La culture nerdo-Gundam n’ayant pas encore tout à fait percé en France, c’est toujours avec une légère pointe d’exotisme qu’on accueille les rares représentants du genre « mecha » ici-bas. En dehors de Goldorak, cette passion toute nippone pour les robots gigantesques n’a jamais dépassé ici le cercle des happy-fews. Il nous manque sans doute ce culte de l’Apocalypse qui traumatise le Japon depuis Hiroshima, et peut-être cette infime dose de naïveté indispensable pour adhérer à un concept quasi-puéril et improbable.
Robotech est à la base un dérivé américain de Macross, dessin-animé japonais, c’est peut-être ce qui lui a valu l’insigne honneur d’être diffusé sur nos réseaux hertziens. Une série forcément hybride aux yeux des puristes et dont l’adaptation en jeu vidéo souffrirait inévitablement de la comparaison avec des transferts plus mythiques, de Gundam à Super robot taisen. Réalisé par une équipe de fans, Robotech : Battlecry revendique cette part d’identité américaine et sa parenté avec le monde de l’animation, en optant pour la technique de cel-shading. C’est un peu facile, un peu trop évident, mais après tout, avant que Kojima n’applique la même méthode pour son Zone of the Enders 2, ce choix avait le mérite d’attiser notre curiosité. Malheureusement le résultat n’est vraiment pas à la hauteur de nos attentes.
Le premier écueil du jeu, c’est sans doute de ne pas avoir su se démarquer suffisamment du tout-venant shoot’em-up. Quel intérêt de mettre en scène ces machines de guerre si particulières que sont les giant robots si on ne ressent aucune empathie avec le pilote qu’on est censé incarner. C’est un problème de gameplay assez difficile à résoudre -peut être Steel battalion y parviendra-t-il avec sa manette monstrueuse-, mais le fait de ne faire qu’un avec la machine désamorce toute tentative d’immersion. Le « Varitech » transformable qui tient lieu d’habitacle finit donc par être réduit à l’état de joujou sans intérêt. Bien qu’il puisse revêtir plusieurs formes -robot classique « Battloïd », avion de chasse « Fighter » et mode intermédiaire « Gerwalk » moyennement maniable-, on ne ressent jamais la nécessité d’en changer en dehors des passages qui ne laissent pas d’autres possibilités. Le level-design est bien trop scripté, et trop binaire : au sol, on utilise le Battloïd, dans l’espace le Fighter. Et parfois, trop rarement, le mode Gerwalk lorsque la lenteur du Battloïd devient trop pesante. Les possibilités offertes par l’aspect transformable du Varitech sont complètement sous-exploitées, au service d’un jeu aux missions bien trop scénarisées. Du coup, on pense souvent à Rogue leader lorsqu’on joue à Battlecry : on s’y ennuie au moins autant, si ce n’est plus. Répétitif, mou et trop scripté, Robotech n’a, en outre, pas le même pouvoir immersif que Rogue Leader qui permet au fan de se plonger en plein coeur des batailles les plus mythiques de la première trilogie Star wars. L’utilisation du cel-shading, plutôt séduisante sur le papier, n’est pas assez léchée pour faire le rapprochement avec le dessin-animé. Si la modélisation des robots est plutôt réussie, les décors, eux, sont ternes, vides et pas franchement variés. Un moteur 3D passe-partout, idéal pour le multiportage auquel le jeu de TDK semble destiné. Robotech échoue donc sur toute la ligne, ne parvenant ni à proposer un shoot digne de ce nom, ni à assurer le fan-service minimal. Une madeleine de Proust au goût bien amer…