« Déjà-vu »… En utilisant le moteur 3D et le principe du binôme de héros empruntés à Jak & Daxter, les développeurs d’Insomniac, qui ont fait leurs gammes sur Spyro le dragon, devait probablement s’attendre à ce genre de remarque. Sequel officieux du jeu de Naughty Dog, par la force des choses et d’une sensation proche de la persistance rétinienne, Ratchet & Clank ne se contente pas d’assumer une seule et évidente filiation. Il pille allègrement à droite à gauche tout ce qui a pu se faire dans le genre plates-formes, de Banjo & Kazooie à Sonic adventure, en passant par l’improbable Munch’s odyssey. Rien de séminal si on met de côté cette inépuisable liste de gadgets dont disposent nos deux protagonistes -une sorte de mogwai sarcastique et un petit robot genre boîte de conserve- pour mener à bien leur quête de justice. Un panel d’armes, d’hélipacks, de casques, bottes spéciales, qui va du plus classique au plus ingénieux. Un état d’upgrade permanent qui démarque légèrement Ratchet & Clank de ses adversaires, mais ne nous emballons pas : le bébé d’Insomniac est un jeu tout ce qu’il y a de plus académique. Scénar’ multi-rabâché -sauver l’univers d’une sorte de Berlusconi local-, environnements typiques -villes, forêts, monde de feu, monde de glace, île tropicale, etc.-, le jeu joue la carte de l’efficacité contre celle de l’innovation à tout prix. Ca lui a plutôt réussi.
Ratchet & Clank, c’est donc Jak & Daxter puissance 10. Les décors du jeu de Naughty Dog étaient déjà magnifiques, mais ici, le résultat flatte encore plus la rétine. Les planètes visitées par Ratchet et son compagnon sont immenses, traversées par des multitudes d’engins futuristes, gonflées par une profondeur de champs impressionnante. Des stages qui grouillent de vie et d’animation, même si le concept de niveau unique qui faisait la particularité de Jak & Daxter est passé à la trappe. Forcément, on ne parle plus d’un immense archipel mais d’une galaxie toute entière. Les niveaux sont donc tous bien distincts les uns des autres, la transition étant assurée par des cinématiques très courtes à base de voyages intersidéraux. Ratchet & Clank surprend donc beaucoup moins que son prédécesseur, qui reste une référence encore aujourd’hui. Plus long, un peu plus corsé, et beaucoup plus beau, le jeu d’Insomniac se contente juste de faire son boulot correctement. Quasiment pas de problèmes de caméra, une maniabilité éprouvée mais irréprochable, un gameplay varié, des qualités qui compensent les carences d’originalité et de personnalité.
Alors qu’on ne voudrait défendre que les pionniers ou les avant-gardistes, on se prend à aimer Ratchet & Clank et à ne plus pouvoir en décrocher. Le plaisir n’atteint pas les cîmes de Super Mario sunshine qui donnait tout de même un peu plus de fil à retordre, mais chaque atterrissage sur une nouvelle planète est une telle source d’émerveillement qu’on ferme naturellement les yeux sur les lacunes du jeu, sur l’absence de petit supplément d’âme et de prise de risques qui auraient fait de ce jeu un inoubliable du genre. Alors que Blinx se vautre lamentablement malgré son idée « révolutionnaire » de manipulation temporelle, Ratchet & Clank se pose indubitablement comme une valeur sûre sans rien apporter de neuf au genre. Il n’y a vraiment pas de justice dans ce bas-monde vidéoludique.