Lara Croft laissée pour morte, le verdict est sans appel s’agissant du jeu d’action 3D : à force de donner dans l’énigme alambiquée et l’humour tordu, on a fini par oublier l’essentiel, soit le plaisir du joueur. Ce que rappelle en toute modestie le dernier titre de Bungie Software, Oni, étrange mélange de Tomb raider et de beat‘em all.
Difficile effectivement de retrouver l’ambiance chaleureuse des manoirs aristo version Angleterre victorienne ou les décors psychédéliques d’un No one lives forever : ici, on cause interface neuronale et bidouillages génétiques. Entre Ghost in the Shell et le « Big Brother is watching you » d’Orwell, le titre de Bungie Software opte pour un monde futuriste, où contrôle paranoïaque et manipulations en tous genres sont de rigueur. Dans une société ultra-surveillée, la belle Konoko, agent d’élite de la TCTF (Technology Crime Task Force), enquête sur les agissements un rien suspects de l’organisation criminelle locale, sobrement appelée le Syndicat. Première bonne nouvelle, Oni évite sans grande difficulté l’éternel combat entre Bien et Mal. L’intrigue est en effet assez touffue pour rapidement brouiller les pistes, densifiant le propos tout en restant compréhensible : au cours du jeu, de nombreux indices agrémentés de cinématiques rythment la progression de l’héroïne et dévoilent avec finesse la réalité des forces en présence. Bref, les personnages deviennent rapidement sympathiques, et c’est avec un certain plaisir qu’on les suit de découverte en découverte.
Pas la peine non plus de ressortir du placard ses bonnes vieilles habitudes de Sherlock Holmes en culottes courtes. Oni, pur produit de la culture japanim, est beaucoup plus orienté action que recherches interminables dans un dédale sans fin. Avantage indéniable : on évite ici les prises de tête habituelles devant la dixième porte verrouillée de la journée, les phases « charades et devinettes » se résumant à activer divers interrupteurs pas franchement dissimulés. Même constat en ce qui concerne les fameux indices, il suffit tout simplement de se coller aux nombreuses bornes interactives pour savoir de quoi il retourne.
Fusil à plasma, pistolet-mitrailleur, lance-missiles ; coups de poing, salto avant ou coup de pied arrière, à vous de choisir la méthode idéale pour mettre à plat la défense ennemie. Car finalement Oni n’est rien d’autre qu’un avatar des beat’em all d’antan, la progression dans le jeu se mesurant au nombre de cadavres amoncelés. Comme dans les meilleurs titres de bornes d’arcade réapparaissent le système des combos de plus en plus complexes au cours du jeu et la présence habituelle des boss de fin de niveau, ce qui nécessite dextérité et patience. Rien de bien nouveau certes, mais une redoutable efficacité et une jouabilité exemplaire au service d’un plaisir indicible de casser des nuques. Sans rire, les premières acrobaties aériennes de Konoko font leur petit effet comparé aux poussifs déplacements de Lara Croft ou les translations horizontales de la majorité des FPS, Quake III en tête. Malgré une réalisation graphique et sonore irréprochable et une intelligence artificielle digne de ce nom, Oni ne parvient pas cependant à dépasser les limites du genre, transformant rapidement cette chorégraphie pour un massacre en un ballet bien trop mécanique.