La maison Nintendo est en ruines, ou plutôt en morceaux, éparpillés façon puzzle. Ici, un petit Mario s’invite en douce dans le monde bucolique de Kirby – à moins que ce ne soit un Luigi ? Là, un Super Mario Bros 2, un Punch-Out, un Kid Icarus, un Dr Mario sont réduits à leur plus simple expression, décomposés en tâches simples (ramasser un nombre donné de légumes, réussir un uppercut, provoquer une réaction en chaîne…) qui ne demandent ensuite qu’à être enchaînées ou entremêlées. Ça tombe bien : c’est exactement ce que se propose de faire NES Remix 2, prolongement quatre mois plus tard de l’une des meilleures surprises de l’eShop Wii U. Le titre n’a pas été choisi au hasard : la logique, ici, rejoint bien celle du remix musical, avec une sélection de tubes de la NES – on en dénombre douze, de Metroid à Zelda II – dans le rôle des morceaux d’origine dont les éléments ludiques de base (disons les pistes, les sons, les rythmes…) sont prélevés, isolés, triturés, recombinés.
Dans la lignée des premiers Wario Ware (et plus précisément des mini-jeux qui y étaient présentés par le retrogamer encasqué 9-Volt), NES Remix 2 est comme un sous-produit joyeusement expérimental de la perpétuelle exploitation commerciale de la ludothèque NES. Cette fois, il ne s’agit pas de se replonger avec nostalgie dans les jeux du passé mais d’aller voir de plus près de quoi ils étaient vraiment faits – regarder sous la peau, soupeser les organes, éprouver les articulations. A nous de scruter ce qui les faisait tenir (ou pas tant que ça, avec le recul). De vérifier éventuellement ce qu’ils ont à nous dire et à nous faire ressentir un quart de siècle après leur création. Tout en nous testant au passage, la course aux meilleurs score et temps (et au déblocage de nouvelles épreuves, inévitablement) servant logiquement d’incitation à persévérer. Que se passerait-il (et est-ce que ce serait bien, d’ailleurs ?) si la star de Super Mario Bros 3 était la princesse Peach ? Et si le scrolling du premier Super Mario Bros nous baladait de la droite vers la gauche plutôt que dans la direction opposée ? La réponse à cette dernière question est à chercher dans Super Luigi Bros, accessible dès l’écran d’accueil et qui est exactement ça : un SMB complet mais inversé, à la manière des circuits en « mode miroir » de certains jeux de course, et avec le moustachu au pull vert en vedette sautillante.
On peut voir NES Remix 2 comme une leçon de game design un rien déviante, façon reverse engineering festif, les mains dans le cambouis des mécaniques ludiques pour mieux s’en barbouiller la figure après. La démarche fait aussi écho au travail des modders, voire aux détournements de certains motifs et icônes du jeu vidéo par l’art contemporain à l’image du Super Mario Clouds de Cory Arcangel qui, du SMB originel, ne conservait que les nuages. Mais NES Remix 2 est surtout la plus dansante de toutes les déclarations d’amour au médium jeu vidéo, une sorte de musée mutant lui-même follement ludique. On ne regrettera qu’une chose : que les développeurs ne nous permettent pas de réaliser nos propre remix et mash-ups à partir de Kirby’s Adventure, Wario’s Woods ou The Lost Levels – on a déjà plein d’idées. La prochaine fois, peut-être ?