Indiscutablement, Max Payne 2 est magnifique et annonce à sa manière ce que sera dans la forme le FPS next-gen, celui qu’on verra débouler en masse dans quelques mois (Half life 2, Doom 3 et consorts). L’aventure nous est narrée sous forme de BD-roman-photos pour les intermèdes et en cinématiques pour poser le contexte avant chaque début de mission. Soyons clairs : il s’agit là d’une incontestable prouesse technologique, via laquelle les Finlandais de Remedy réussissent à dégager une atmosphère atypique pour une aventure qu’on parcours comme on entre dans un bon vieux polar glauque de Fincher ou de Polanski, ici en suivant chapitre par chapitre les déboires de Max Payne et de Mona Sax, sorte de Lara Croft / Trinity impliquée dans une affaire de meurtre. Vous incarnez tantôt l’un tantôt l’autre, selon les situations, sachant que nos deux protagonistes ne se perdent jamais de vue dans les bas fonds crapuleux de Big Apple –Max Payne 2, c’est aussi une histoire d’amour bien gnan-gnan. Bel exploit également dans les détails : après une explosion, le décors s’effritent doucement, les objets glissent le long du sol, les poutres et les parcelles de murs s’effondrent une à une, redéfinissant même parfois le parcours à suivre (on s’emballe pas, tout ça est naturellement scripté). Bien sûr, on retrouve le fameux « bullet time » -filtre sépia en prime-, mais l’effet de surprise du premier opus n’a plus court (d’autant que les mauvais élèves sont passés par là).
Jusque là, tout va bien. Jusqu’au jeu proprement dit en vérité, puisque toute cette sublime séance d’épate ne cache pas hélas la faiblesse ludique de Max Payne 2. Cette désagréable sensation d’extrême linéarité et de progression dans le jeu au service d’une narration – et non l’inverse. Résultat, on peine à entrer véritablement dans l’action, enchaînant les missions comme autant de saynètes interactives vécues à distance, parfois même avec ennui.
Restent quelques beaux moments oniriques, entre flash-back, cauchemars et autres échappées psychotiques et hallucinatoires -Payne voit par exemple ses doubles se lamenter en cellule- dont on signalera encore une fois la perfection formelle des rendus. Enfin le gameplay s’améliore un peu en cours de partie, avec de vraies trouvailles scénaristiques qui relèvent la sauce. A l’image de cette chasse aux mafieux chez Mona, dans une espèce de train fantôme géant à l’intérieur duquel il faudra démêler le vrai du faux. Effets de surprises et de frayeurs garantis. Pas mal non plus le coup de l’escorte de Vinnie, bombe humaine qui se déclenche s’il se fait abattre ; ou encore la poursuite de Vladimir Lem réfugié sur un dôme de verre duquel il nous arrose d’explosifs.
Malgré cela, difficile de s’immerger comme il faut dans Max Payne 2 du fait, sans doute, de l’importance du récit, plus travaillé lui que le jeu lui-même. Belle oeuvre d’art numérique en somme ; question gameplay, en revanche, ça reste assez anecdotique.