Mario Kart, c’est une histoire de parano. Et de complot. Tous vos concurrents ont beau faire semblant de s’envoyer quelques bourres, on sait bien qu’on est seul contre tous sur la piste. Que tous les instruments de torture, carapaces, bombes et peaux de banane, vous sont destinés. Que l’ordinateur triche de manière éhontée, rattrapant miraculeusement son retard juste avant la ligne d’arrivée, vous volant littéralement votre victoire au dernier moment. C’est un trip imputrescible, sur lequel il est difficile d’innover, sous peine de perdre ce qui en fait le charme et la substantifique moelle. Pas de risques de ce côté là puisque Nintendo fait de la résistance. Contre vents et marées « tendances », l’éditeur s’obstine sur la voie du kawai coloré, déclinant avec une rigueur quasi métronomique et une régularité de fonctionnaire, ses licences les plus prestigieuses et les plus cucul sur chacune de ses machines. Conservant cet univers régressif qui le caractérise, le renforçant, même, jusqu’à l’hystérie (cf. les délires tropicaux de Mario Sunshine, ou le cell-shading ultra-caricatural de Zelda : The Wind waker). Pas la peine d’espérer, « Mario ne flinguera jamais des putes ». Même sur un kart, Mario reste gentillet.. La lutte pour la victoire est âpre, mais bon enfant : personne ne meurt brûlé vif dans de gigantesques explosions, on ne s’attaque pas à coups de tronçonneuses ou de lance-flammes.
Ce Mario Kart GameCube, baptisé Double dash !!, fait donc dans la continuité pépère. Mais cette volonté jusqu’au-boutiste, de la part de Nintendo, d’assumer cet univers hors-d’âge est un peu passée à la trappe. Double dash !! reprend la charte graphique Nintendo sans y insuffler quoi que ce soit de nouveau, sans la transcender. Joli et mignon, pas d’abus d’effets next-gen, point. C’est un peu le problème de ce nouvel épisode, il n’apporte rien de substantiel à la série. Evidemment, il y a désormais un co-pilote (d’où le titre), la possibilité de jouer à deux en mode coopératif -relativement amusant-, des armes « spéciales » exclusives à chaque personnage, la suppression du saut et des vies qui fera hurler bien des puristes. Mais ça ne change finalement pas grand-chose au concept de base. On est en terrain connu. Et, à la limite, on ne se pose même pas la question de savoir si c’est le meilleur épisode, ou le moins bon. On s’en fout. Mario Kart : Double dash !! est fun. Nintendo aurait certes pu assurer un peu plus que le strict minimum syndical, bousculer ses habitudes et ses certitudes. Ne pas se contenter de rafraîchir superficiellement la plupart des gimmicks fondateurs de l’identité de la série. Condamné à décevoir les nostalgiques, l’éditeur est un peu pris au piège de son propre passif. Reste que si Mario Kart : Double Dash !! joue les petits-épargnants, il conserve l’intégralité de sa puissance ludique.