« Aujourd’hui, l’univers de la BD a perdu en spontanéité et en richesse d’expression » affirmait l’auteur de BD Benoît Sokal à l’AFP, à l’occasion de la sortie nationale du jeu L’Amerzone. Avant d’ajouter : « Le genre nouveau que représente le jeu vidéo vieillira peut-être de la même façon, mais pour l’instant, c’est un support de création vraiment gratifiant ». Celui que l’on s’accorde à voir aujourd’hui comme l’un des chefs de file de la bande dessinée européenne a pris son pied dans la conception d’une œuvre interactive que l’on ne peut s’empêcher de comparer à Myst ou Riven. A Ring également, le jeu de Cryo auquel avait justement pris part un autre dessinateur, Philippe Druillet. La comparaison est à ce point inévitable qu’on peut la pousser jusque dans les limites ludiques inhérentes au type même du jeu, dit « aventure interactive ». Evidemment, on s’adresse clairement à un plus public large, pas trop porté sur le jeu vidéo, peu enclin aux ordinateurs et à la technologie en général, plutôt lectorat type de Télérama voyez…
L’Amerzone est une contrée imaginaire située en plein cœur de l’Amérique du Sud. Un micro-univers parallèle où les mythes et les légendes vont bon train. Vous êtes journaliste et, en tant que tel, vous décidez de vous lancer dans un reportage a priori léger et rafraîchissant : le mythe des oiseaux blancs. On raconte que les oiseaux blancs, cadeaux des dieux, apportent aux indiens la vie éternelle. Hélas, un sorcier a volé l’œuf créé par les dieux laissant une malédiction s’abattre sur l’Amerzone. L’enquête vous emmène d’abord en Bretagne chez un vieillard qui a eu la chance d’explorer autrefois le pays imaginaire. Très vite, vous apprenez qu’il s’agit en réalité du sorcier de la légende et que l’homme n’a pas voulu causer tous ces troubles puisqu’il pensait bien faire en ramenant l’œuf pour l’exposer dans le musée du coin. Aujourd’hui bien trop vieux pour entreprendre une nouvelle fois le voyage (l’homme succombe d’ailleurs juste après s’être entretenu avec vous), c’est à vous qu’il confie la mission de remettre l’objet à sa place, en Amerzone…
Il vous faudra, au fil de l’aventure, récupérer des objets, déjouer des mécanismes et examiner à la loupe quelques détails utiles pour la bonne résolution des énigmes. Comme dans Riven, le joueur évolue dans un environnement 3D avec une vision à 360°. Tout l’intérêt du jeu réside dans son atmosphère, soit les décors, les animations et les sons. Excellent travail que l’on doit sans aucun doute à la patte de maître Sokal. Techniquement, en revanche, on peut relever quelques points noirs : les transitions brutales au passage d’un écran à l’autre, le manque de scènes animées…
Mais c’est surtout l’ennui du joueur qui risque de faire vraiment défaut au jeu, car, en définitive, il ne s’y passe pas grand chose, et il faut une sacré dose de courage (et beaucoup de temps libre) pour en voir le bout. Il faut, en ce sens, vivement déconseiller L’Amerzone aux hardcore gamers, « bien trop peu contemplatifs », dixit Sokal, à qui on ne saurait trop conseiller de tester et de contempler, justement, X-Wing Alliance. Par exemple.