Pas totalement emballée par le résultat, l’équipe de Relic a jugé bon de revoir sa copie quitte à décaler sérieusement la date de sortie du jeu. Pratique courante dans le monde du jeu vidéo, on s’y fait… d’autant plus qu’il s’agit d’une cause juste et que l’objet du retard est comme ici clairement avouée. Homeworld débarque donc enfin aujourd’hui sur nos micros et le soft ne passera pas inaperçu. D’abord parce qu’il s’agit d’une mini-révolution dans le genre stratégie temps réel : l’espace aidant, le théâtre des opérations n’a plus aucune limite physique (en x, en y et en z si vous préférez). Difficile d’être gêné par les seules forces en présence et les quelques astéroïdes de passage dans cet océan cosmique illimité. Certains ne verront pas cette spécificité d’un très bon œil puisque le fait de jouer avec les décors peut se révéler parfois d’un intérêt stratégique indéniable. Pas faux. Bien peu d’obstacles donc dans cet univers d’une beauté graphique exceptionnelle (y compris sur un PC faiblard) qui facilite sans aucun doute l’immersion dans l’infini, aider en cela par de nombreuses séquences narratives et révélatrices. Tout comme les musiques enivrantes et les voix neurasthéniques (entendues sur une version V.O.) qui scient à merveille à ce space opera interactif.
Ensuite, Homeworld profite d’une interface de jeu absolument incroyable. Pas simple de contrôler tout son camp dans ces espaces vides, or les garçons de chez Relic ont royalement su honorer leur ambition. Avantageusement mis en valeur dans ce vide intersidéral, chaque élément du jeu est manipulable et visionnable sous tous les angles. Bouton gauche de la souris pour sélectionner une ou un groupe d’unités, bouton droit pour contrôler l’angle de vue de la caméra et bouton-molette au centre pour zoomer sur la sélection. Admirez le travail : du plus petit engin (le Scout) au vaisseau-mère, les concepteurs n’ont pas lésiné sur les détails graphiques. Un régal également que de suivre en vue rapprochée ses escouades offensives, quelle que soit la formation choisie.
La trame scénaristique, on y vient, n’est pas en reste : on sait aujourd’hui que la planète Kharak est veille de 6 milliards d’années et que les Kushans l’habitent depuis 1300 ans. Seulement on ne sait absolument rien de ce qui précède les 13 siècles de son histoire sur ces terres et la question des origines taraude sec les esprits. Car c’est une certitude : la vie Kushan n’a pas commencé ici puisque la première cité de Kharak, Khar-Toba, fut construite autour d’un vaisseau échoué. Preuves en sont les résidus de l’engin et autres vestiges récupérés sur l’épave. Parmi ceux-ci, une étrange pierre noire sur laquelle figurait un schéma tridimensionnel représentant Kharak dans la galaxie, reliée à une autre planète : Hiigara. Sans nul doute, la case départ ! Le moment est venu de retrouver le berceau de la civilisation Kushan. C’est dans cet objectif qu’un gigantesque vaisseau-mère est bâti -60 années de recherches, de construction et de mises au point. Une véritable arche de 600 000 âmes à la recherche de la terre ancestrale… une quête finalement obligatoire puisque la planète Kharak est réduite en miettes lors d’un essai de saut en hyperespace ! Les responsables du massacre ? Une civilisation inconnue qui vous a condamné en exécutant votre monde sur-le-champ pour avoir enfreint la loi. Une loi dont vous ignorez bien entendu l’existence et qui prohibe l’utilisation de toutes technologies hyperspatiales. Evidemment, dans ces conditions, la tâche qui vous incombe prend une toute autre ampleur, car il faudra faire avec l’ennemi, bien décidé à n’accepter aucune dérogation à cette règle en vigueur dans tout l’univers.
Si Homeworld a quelque chose de révolutionnaire, pour autant cela ne fait pas de lui une référence incontournable. Le jeu pêche effectivement en terme de gameplay et par extension, de durée de vie. 16 missions, c’est un peu court, même si ça se complique méchamment à partir de la 8e (« la cathédrale de Kadesh ») -il faudra souvent reprendre une mission précédente en construisant davantage d’unités offensives et en limitant les dégâts sur les escouades déjà existantes parce que c’est du costaud qui vous attend dès lors. Finalement, cette impression de trop peu se ressent globalement dans le jeu. On frise certes la perfection à tous les niveaux, mais ça ne va jamais bien loin : un seul type de collecteurs, deux sortes de ressources dont l’usage est similaire -qu’il s’agisse de minerais ou de gaz dans les nébuleuses, elles vous servent à construire de nouvelles unités. Distinction purement formelle également s’agissant des vaisseaux dans les deux camps. Qu’ils soient Kushan ou Taiidan, les intercepteurs, les corvettes multi-gun ou encore les destroyers respectifs vont jusqu’à afficher les mêmes spécificités techniques (masse, puissance de feu, armure, couverture, maniabilité, vélocité et fonctions spéciales). Du coup, le choix des races n’a qu’un intérêt limité.
Enfin, on a rarement fait plus minimal dans l’évolution des technologies. Au programme : l’invisibilité (façon « cloaking device » amis trekkers), bombes plasma, cannons à ions, missiles guidés… ne gâchons pas le plaisir du joueur qui découvrira les deux ou trois autres joyeusetés. Léger tout ça.
Quoi qu’il en soit, le genre stratégie temps réel prend une nouvelle claque. En mode multi-joueurs notamment, palpitant. Sûr que les Starcraft et autres Total annihilation perdent un peu plus encore de leur saveur visuelle et technique, voire ludique. A n’en pas douter, ce jeu va faire des émules chez les éditeurs/cloneurs de service. Dans le fond, tant mieux. De là viendra forcément une future référence…