Après un moyen Fighting force, un opus 2 totalement abâtardi par une vaine pincée d’aventure et un Jackie Chan qui ne va pas jusqu’au bout de sa jouissance, on peut se demander ce qu’il reste au beat’em-all de son formidable héritage ludique. Des Double dragon, Final fight, Streets of rage ou Renegade, il ne reste plus rien, si ce n’est un tas de cendres sur lequel des éditeurs se penchent pour souffler en espérant raviver quelques vilaines braises. Résultat : on se retrouve dans le nuage de nos propres souvenirs sans réussir à retrouver nos sensations d’antan. Après avoir aperçu les premières vidéos de Gekido, il y a déjà plusieurs mois, on était en droit d’espérer qu’un éditeur ait enfin saisi la philosophie du genre : faire mal, un point c’est tout ! Hélas, la version finale a de quoi nous laisser un désagréable goût au coin des lèvres, et ce n’est pas celui du sang des victimes.
Vous avez le choix entre une huitaine de cogneurs professionnels (certains doivent être débloqués) dont les faciès ne sont pas du genre à exprimer la tendresse. Manganisés à outrance, les personnages ont la gueule de l’emploi, carrée et inexpressive. Un hommage aux productions légendaires du genre, toutes d’origine asiatique. Mais une fois lâché dans ces ruelles virtuelles nippones, on retrouve difficilement, cachés derrière un manque évident de polygones, ces visages taillés à la serpe. Les charismatiques personnages se transforment en énigmatiques silhouettes, alouettes… Et ce n’est pas un traitement de faveur uniquement réservé aux forces du Bien. Avec un peu de talent, vous réexpédiez bien trop rapidement vos ennemis en enfer pour avoir le temps de s’apercevoir de qui il s’agit. A deux joueurs, les bourdes et autres quiproquos vandammiens (du genre qui font mal) s’enchaînent au point que, rapidement, l’envie de se venger de son compère de rixe devient une obsession. Pourtant le désir de remettre au goût du jour un genre dont les classiques remontent aux années 80 (un parallèle serait à faire entre les beat’em-all et la mentalité de l’époque…) était bien réel. Et les ambitions étaient là. Avec une équipe restreinte, Gremlin avait tout refondu dans une mise en scène pleine de zooms et de mouvements de caméra. Or, à force d’en faire trop le joueur finit par se lasser de tous ces yoyos visuels. En particulier de ces zooms intempestifs sur le champ de bataille qui deviennent plus éreintants que les coups que l’on peut encaisser. D’ailleurs la quinzaine de niveaux est rapidement parcourue, malgré la liberté de choix de l’itinéraire, surtout dans une partie à deux contre tous. Il faut dire que tout est fait pour vous y aider.
En utilisant l’environnement, le joueur peut exterminer ses adversaires de mille façons et se servir des objets qui jonchent le décor. Comment ne pas avoir pensé plus tôt, par exemple, à balancer ce distributeur de boissons en pleine poire de votre agresseur… Les bagnoles, les caisses volent dans tous les sens, les coups de trique pleuvent, les mandales décollent, les furies arrachent tout ce qui se trouve devant vous, une véritable tempête de pixels ! Entre les explosions provenant des décors et celles provoquées par vos coups les plus puissants (que l’on apprend progressivement en augmentant son niveau d’expérience), difficile de tenir le rythme. Dommage que les concepteurs qui proposaient au demeurant sur le papier de nombreuses innovations (exemple : le jeu à quatre dans une arène fermée…) aient finalement opté pour la seule voie de l’épate. Quid de la jouabilité et, par extension, de l’intérêt ? Que dalle, rien de neuf dans le beat’em-all !