Crevons l’abcès : le Fallout que vous avez tant aimé, celui de Black Isle, est mort juste après le deuxième épisode, en 1998. Dix ans plus tard, le studio Bethesda (The Elder scrolls) a repris – « dérobé », diront certains – la licence en main et, sans grosses surprises, se l’est réappropriée sans le moindre scrupule. Fallout 3 est donc un jeu Bethesda jusqu’au bout des ongles, – peut-on vraiment le lui reprocher ? – et ce dès les premières minutes, avec son introduction en huis clos dans un abri atomique souterrain qui tranche habilement avec la vertigineuse sensation de perte de repères qui prend le joueur par surprise dès qu’il se retrouve à l’air libre.
On pourra toujours reprocher au jeu un gameplay un peu bâtard, une palette de couleurs aux délicieux relents de pissotière, et des PNJ raides comme la justice, mais la vision d’Apocalypse, et la reconstitution de la ville de Washington mise en pièces par la bombe atomique, que propose Fallout 3 sont véritablement saisissantes. Jeu-monde opulent à défaut d’être vraiment cohérent, l’œuvre de Bethesda croule un peu sous le poids des citations cinématographiques et littéraires, s’éparpille, s’engage sur de dangereux chemins de traverse et finit par ressembler à un immense parc à thème post-nuke. Comme tous les titres Bethesda, Fallout 3 est un jeu qui peut dérouter, fasciner, profondément ennuyer… ou rebuter par son côté inabouti, crasseux, finalement un peu jean-foutre. Difficile, pourtant, de résister à l’appel de la randonnée dans un monde à la beauté décrépie qui dresse un constat aussi désespéré sur l’Humanité. Le jeu de Bethesda emporte la mise sur la longueur, lorsqu’on finit par s’y sentir comme chez soi, qu’on y revient pour retrouver un environnement familier auquel on s’est inexplicablement attaché. Ce qui rend d’autant plus incompréhensible la décision de ses concepteurs de ne pas laisser la possibilité au joueur de prolonger sa partie au delà d’une quête principale un peu trop rushée et d’un générique de fin qui nous tombe sur la nuque comme un couperet.