A sa sortie en 2008, Bionic commando rearmed célébrait les fiançailles entre Capcom et le studio suédois GRIN. L’entente semblait totale, et le jeu annoncer un mariage à consommer sans modération avec la sortie, presque un an plus tard, d’un véritable reboot next gen du titre d’origine. Mais l’affaire a tourné au vinaigre, le Bionic commando en 3D de GRIN n’a pas convaincu (à tort), et l’histoire d’amour entre le Japonais et son sous-traitant européen a capoté ; enchaînant les bides, le studio ne tardera d’ailleurs pas à couler ensuite. On ne peut pourtant pas dire que les Suédois ont fait un mauvais boulot. Jolie relecture soignée et méthodique d’une licence aussi célèbre que jamais ressuscitée, Rearmed participait à sublimer une 2D décidément impérissable. Parmi la vague de titres que Capcom a sorti de ses cartons pour leur donner un coup de polish, il était même nettement au-dessus du lot avec sa direction artistique et son gameplay maîtrisé. Conscient de tenir entre les mains une petite pépite, Capcom a mis en chantier sa suite, toujours sous-traitée à des occidentaux (et suédois). Désormais entre les mains de Fatshark – que des anciens de GRIN ont rejoint après sa fermeture -, Bionic commando rearmed 2 est un titre sans âme. L’artisanat méticuleux du premier épisode, son goût pour le jeu de plateforme impitoyable, art du timing et du skill, tient du souvenir remontant péniblement à la surface. Il manque à peu près tout à cette suite, sur laquelle on sent les compromis, à commencer par l’introduction du saut, révolution du gameplay dès lors beaucoup plus abordable et sécurisé, surtout avec un level design sans talent, linéaire, basique, ennuyeux.
Boss aux patterns ankylosés, blagues à deux balles, difficulté régressive, cachet visuel discount, Rearmed 2 nivelle tout par le bas. Rien ne semble fait avec conviction et désir, mais plutôt amertume et incapacité à retrouver l’énergie créative de GRIN. Quand au même moment Konami sort Hard corps : uprising, une adaptation du légendaire Contra confiée au compatriote japonais Arc System Works, on mesure l’écart qui sépare ces deux remaniements de l’âge d’or des 8 bits. Du côté Hard corps, avec une réinterprétation à la fois fidèle et transgressive qui ouvre le gameplay à des possibilités vertigineuses : contre, course, esquives multiples, dash aérien, difficulté sadique, design shonen racé, le nouveau Contra sublime le run’n gun, quitte à faire bifurquer le genre par son milieu. De l’autre, avec Bionic commando rearmed 2 : un système minorant les efforts de son prédécesseur, un jeu complaisant avec une politique d’accessibilité qui n’est pas compensée par quoique ce soit. Là où Arc System impressionne de vitalité, innovation, optimisation, exportant tout son savoir faire en matière de versus fighting pour réanimer le run’n gun dans Hard corps, Fatshark rend sa copie d’élève blasé. Bionic commando rearmed 2 rejoint ainsi les pauvres titres customisés par Backbone pour Capcom (1943 Joint strike, Commando 3). Nouvelle confirmation que l’éditeur a du mal avec ses sous-traitants étrangers après l’échec de Dark void, même si Dead rising 2 a sauvé sa chemise. Qu’espérer alors du prochain Devil may cry développé par les britanniques de Ninja Theory (Enslaved : Odyssey to the west), dont le choix laisse sceptique ? Balbutiantes mais croissantes, les joint-ventures entre Japon et Occident sont-elles vraiment possibles en dehors de quelques exceptions ? Si Castlevania : Lords of shadow et Rearmed selon GRIN ont prouvé que oui, pour Capcom la décision est prise : plus aucun jeux originaux, les studios étrangers n’auront le droit que de développer des suites et des portages.