On a croisé la jeune britannique Emma Niblett lors de la sortie de Kidnapped by Neptune ou encore I am et Sweet heart fever, des albums hérissés de mille feux et follets joyeux mutés en jeunes folies douces, déroulés sur deux écuries mesmérisantes : Too Pure et Secretly Canadian. Détaillant comme nulle autre sa love-story tordue avec la métropole universelle qu’est l’imaginaire, Scout Niblett, avec This fool can now die now, nage dans les astres, pulse une collection de rencontres rock & folk confectionnées avec l’aide d’un comité de grands penseurs défroqués (Steve Albini, Will Oldham, Herman Dune…). Miss Emma est une personne a(n)imée dont le tourment ne se rencontre pas seulement en musique. Cette artiste bouleversante, qui ne tombe jamais dans le pathos, se vautre avec plaisir dans une imagination créative lumineuse. Enième rencontre avec un ange en mode chansons affamées, coincé entre amours improbables, ruptures soutenues et ciel criblée de nébuleuses.
Chronicart : Tu as débuté aux côtés d’artiste liés au label Secretly Canadian…
Scout Niblett : J’ai effectivement commencé à voir ma musique editée via Secretly Canadian en 2001, notamment lorsque je bossais avec Songs : Ohia, avec qui j’ai fait ce fameux split sur vinyle. J’ai sorti un 12 inch et puis j’ai été contacté par plusieurs labels. Ensuite, je suis restée collée à la petite famille qui tourne autour du label SC et je me suis échapée en solitaire, en gardant contact avec tout le monde. J’ai d’ailleurs sorti des trucs sur Too Pure, mais en 2004, par exemple, j’ai sorti le Ep Uptown top ranking sur Secretly Canadian.
Tu aimes le format vinyle ou ce sont les labels avec qui tu travailles qui te proposent de sortir tes disques sous ce format ?
J’adore les vinyles. Les couvertures des pochettes sont importantes, la nature du son sur vinyle est d’une autre dimention, même si les albums qui sortent aujourd’hui sur cd ou autre format ont un son niquel. Mais le côté rassurant et chaud des vinyles fait partie de mon univers.
Le titre de ton nouvel album (This fool can now die) parle de quel fou ?
C’est moi. Le fou qui peut mourir c’est moi. Après avoir vécu cet album comme un accomplissement, je me disais que je pouvais mourir. Comme lorsque tu atteinds un climax et que tu ne veux plus en redescendre. Tu te tues. Au bord d’une plage ou dans un studio.
Tu sembles toujours être attirée vers le ciel. On le ressent dans tes textes. L’ imaginaire te paraît-il plus attractif que le réel ?
Je pense depuis longtemps que la réalité est bien trop affreuse pour qu’on puisse l’aimer de façon agréable. On l’a supporte souvent la réalité, on ne l’aime pas trop. Je vis plus agréablement dans un monde imaginaire, justement parce que je peux m’y développer, en tant que chanteuse et musicienne qu’être humain. C’est aussi le cas pour mes créations et la vie dans le ciel. Ma vie est beaucoup plus saine lorsque j’imagine que lorsque je vis avec la dure réalité quotidienne.
Tu as collaboré avec Will Oldham aka Bonny « Prince » Billy sur ce dernier opus. Il semblerait qu’il ait eu un poids considérable dans la concotion de ton disque. Peux-tu nous expliquer la genèse de ce travail d’équipe ?
Je fais entièrement confiance à Will Oldham. J’ai toujours adoré son travail, notamment ce qu’il a fait avec Palace et ses albums solos. Il m’a aidé sur plusieurs morceaux, pas seulement ceux où il apparaît en qualité de compositeur/chanteur/arrangeur. Je lui ai demandé son avis sur presque tout pour ce dernier album, musicalement en tout cas. Une expérience enrichissante. Un échange d’idées. De plus, il n’a jamais été trop hâtif dans ses décisions, il m’a poussé vers le haut, vers les étoiles (rires). C’est avec lui que j’ai fait le tracklisting de l’album. C’est important de laisser une marge d’espace à notre relation musicale. J’aime l’échange.
Tu as bossé avec pas mal de talents : comment vois-tu la scène avec laquelle tu collabores musicalement ?
Il ne s’agit pas seulement de musique, j’aime travailler avec des gens dont j’apprécie l’univers. Une sorte d’univers étendu lié au mien, une facon de voir les choses qui me touche fortement. Il s’agit de faire place à la musique avant tout, mais aussi de voir posément la façon de la mettre en son. Je me retrouve très souvent seule sur scène et je n’ai aucun apriori face à cette solitude. Mais j’aime, comme sur mes albums, faire apparaître des invités musiciens, des gens qui ont fait partie de ma vie à un moment donné, qui m’ont aidé à mettre en boîte mes idées et mes sonorités. Cela a été positif depuis le début. J’ai d’ailleurs commencé par un travail de collaboration. Nous parlions de mon premier projet avec Songs : Ohia : Ii s’agissait d’un split, une sorte d’union. L’idée me plaisait d’emblée.
Pour cet album, tu a laissé l’ingénieur son faire son boulot seul ou bien tu as travaillé avec lui en studio ?
Je travaille jusqu’au bout de chaque album. Pour ce dernier, j’ai été en studio pour le mixage, la post-production, le mastering… Surtout qu’il s’agit la plupart du temps de mes sons de batterie, de guitares, de ma voix. J’avais l’appui et le conseil de pas mal de gens surdoués. Je pense avoir encore appris un peu plus…
Avec du recul, comment vois tu ton album I am ? S’agit-il d’une sorte de désaveu d’un amour passé ?
Inconsciemment, l’histoire d’amour que j’ai vécu avant I am m’a profondément marquée. A travers les chansons de cet album, j’ai fait une sorte de thérapie. Une belle thérapie inconsciente. Mais je n’en prends conscience que lorsque l’on me fait la remarque.
Tu as commencé très jeune. Quelles étaient tes influences ou tes attirances musicales ?
Quand j’étais dans ma période Nirvana ou Babes In Toyland, j’ai eu une sorte de souffle qui m’a permi de reprendre un peu de punch. Je trouve que les chansons de Kurt Cobain sont touchantes, simples, droites et uniques.
Tu ne portes pas ta perruque blonde aujourd’hui ?
Je l’ai perdue. Mais j’en ai plein d’autres (rires).
Propos recueillis par
Lire notre chronique de This fool can now die now.
Lire également notre portrait / interview de Scout Niblett, réalisé en 2005.
Voir le site officiel du Scout Niblett