A l’occasion de la sortie de Kidnapped by Neptune, Mademoiselle Niblett a partagé la scène avec Chan Marshall, Herman Düne ou encore Songs Of Ohia… Discrète et pas toujours sûre d’elle, cette océanide énigmatique pose pourtant un univers ambivalent et une musique extravertie, flagellant ses propres fractions rock de voix violentes, pour ensuite susurrer et gémir lascivement sur des airs romantiques. Rencontre avec une fée britannique.
Chronic’art : Le chant et la voix sont chez toi l’expression d’un idéal ou d’une vision lunaire ?
Scout Niblett : Je vis continuellement en période d’identification par rapport à moi, et ensuite par rapport à ma voix, mais de moins en moins. Dès que les gens ne peuvent plus s’identifier, ils s’en vont. Le cinéma y participe, le théâtre, la musique, l’art en général. Pour moi, la voix est un instrument qui sert à partir, aussi bien en live qu’en studio. Le chant implique des choses physiques, une façon de respirer qui est autre.
Sur scène, tu échanges beaucoup avec le public, tout en étant distante…
J’adore la scène. J’ai toujours eu des rapports amicaux avec le public. Lorsque je suis venue à la Guinguette Pirate à Paris, j’ai joué avec le public comme si on répétait ensemble. Je leur demandais de m’accompagner. Mais j’ai plus de mal à parler avec les personnes qui viennent me voir pour me complimenter. Parler avec quelqu’un qui vous dit qu’il adore ce que vous faite, accepter d’avoir le rôle de l’artiste, c’est quelque chose qui m’échappe, surtout lorsque je ne suis pas en train de composer ou de jouer.
Tes incessants déménagements et tournées t’ont permis de rencontrer beaucoup de monde. Qu’en retiens-tu ?
J’ai effectivement échangé beaucoup d’émotions, de sentiments et de musique. Surtout avec Herman Düne, Chan Marshall, Songs Of Ohia… Ce sont des entités artistiques à part entières et je travaille bien lorsque je suis emportée par d’autres mouvements. Lorsque je voyage, j’écris beaucoup et j’entame des trames de morceaux sur la route. Le fait d’être souvent entourée de musicien est un élément positif, surtout lorsque ceux-ci sont à ce point talentueux. J’ai aussi eu la chance d’avoir Steve Albini à mes côtés pour finaliser le mastering de mes travaux. Mais je tiens quand même à rester dans ma bulle, sur mon astre.
Tu évoques souvent les astres. Quel rapport entretiens-tu avec l’astronomie ? Est-ce que ça a un impact sur tes créations musicales ?
Je ne crois pas à l’astrologie que l’on nous livre dans les médias, celui qu’on lit en rigolant, juste pour plaisanter et nous divertir, même si c’est parfois très amusant. Par contre, je crois à l’influence que peut avoir le placement de certains astres. Je crois aux astres lorsqu’ils sont analysés à la lettre, avec les placements des étoiles, lorsque l’on tient compte de l’ascendant et de l’heure précise à laquelle on est arrivé sur Terre. Je suis attirée par les signes astrologiques, sans pour autant être dirigée par eux de façon irréfléchie. J’ai trouvé des réponses dans les astres : des explications rationnelles qui m’ont aidés à comprendre le comportement de certaines personnes autour de moi, mais aussi à analyser mes actions. Par forcément pour la musique. Mais comme tout est lié… Indirectement, j’ai agi avec l’influence naturelle des astres. (rires)
Aussi bien sur scène que sur disque, on a toujours l’impression que tu vacilles entre rage et douceur, entre folie et ingénuité. Ta perruque blonde, tes cris interrompus par des litanies très douces, les guitares sauvages de ton titre Handsome qui contrastent fortement avec les ambiances feutrées de This city et son piano désaxé, par exemple… Quelle est la genèse de ton travail ?
Je n’ai pas vraiment de mode de travail précis. Les états d’âme ou les ballades que j’évoque découlent de mes sensations d’être prisonnière tout en pouvant m’échapper. Et ça concerne tout le monde après tout. Je reste avant tout un compositeur, quelqu’un qui imagine des formes du temps. A l’inverse d’une conception d’un art fermé sur lui-même, il me semble fondamental d’établir une relation avec le monde extérieur. Moi je ne peux pas me séparer, pour l’instant, de ma perruque blonde. J’ai toujours eu un fantasme pour les blondes américaines de années 50’s. Et je n’arrive pas pour l’instant à me détacher de ça. Ca contraste totalement avec l’attitude des brunes qui se teignent les cheveux en blond. Je ne veux pas faire ça.
Ton dernier album évoque aussi bien des travaux précédents que tes morceaux réalisés en live. A la première écoute, tu sembles changer d’univers tout en restant dans les mêmes schémas. En le réécoutant, on sent que tu as tourné quelques pages, notamment celle où tu te livrais presque romantiquement dans ton opus I am…
Je livre beaucoup de ma vie dans mes albums. Je raconte souvent mes fantasmes et mes folies, sans pour autant m’éloigner de la réalité car on ne sait jamais ce qui va nous arriver, ici, demain ou ailleurs. Sur I am, j’étais beaucoup plus axée sur ce qui m’était arrivé par rapport à des personnes qui ont marqué mon existence. Mais la roue tourne… Les étoiles aussi. Je voyage énormément et j’écris tout le temps. Je n’ai pas vraiment une vie stable aujourd’hui et c’est très dur de se fixer humainement parlant. J’essaye d’avancer à mon rythme. J’ai eu pas mal de passages à vide dans ma jeune vie, et la musique a toujours été là pour me blottir dans ses bras…
Tu as réalisé cet album avec Chris Saligoe et le batteur drummer Jason Kourkounis. Pourtant tu joues de la batterie en concert…
J’ai fait confiance à Kourkounis pour son jeu incroyablement précis, pour pouvoir enregistrer en live, faire des prises directes. Sur certains titres, je reproduis exactement les mêmes mesures, les mêmes tonalités, je fais aussi aller les mélodies sur la rythmique et inversement.
Tu as beaucoup tourné, quels sont tes prochains projets ?
Toujours les concerts, dont un UK tour prévu avec Electrelane.
Tu tournes partout, de Los Angeles à San Diego, en passant par Londres et la Belgique, et pratiquement toujours en bonne et belle compagnie…
Oui, j’ai de la chance, j’adore les musiciens qui m’entourent… Oups ! Je dois y aller, il y a un autre journaliste qui attend…
Tu aimes toujours le signe astrologique Lion ?
Oui, je pense que je dois finir ma vie avec une personne qui est Lion.
Je suis né le 25 juillet 1972…
On se reverra au mois de juillet au festival de Dour !
Propos recueillis par
Lire notre chronique de Kidnapped by Neptune.
Scout Niblett sera en concert le 16 juillet 2005 au festival de Dour.
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