Surfant sur aucune vague précise mais plutôt sur des arc-en-ciel de poudre, l’artiste compositeur Komori dirige avec plusieurs partenaires cachés dans l’ombre des night-clubs pétés le label Rolax. Fort d’une expérience de musicien, de gratteux, de bassiste, de chanteur et de voleurs de sons sur Akai S20 ou synthés analogiquement ventrus, Komori joue également un role majeur dans la sélection des signatures Rolax, triés sur un volet rouge sang. Entretien avec un des maillons fort mais caché d’une scène parisienne qui absorbe aussi bien des artistes cotés comme Dwayne Sodahberk, Otto Von Shirach ou Team Doyobi que des jeunes vétérans prometteurs comme Dj Seep ou Computer Truck.
Chronic’art : Raconte-nous la genèse de Rolax, les débuts, les premiers collaborateurs, La vision du label et son placement par rapport à la scène internationale electronique…
Komori : J’ai rencontré le graphiste Mathias Schweizer, Léonard De Léonard et Seep pendant le festival Nördik Impact en 2003. Je Jouais mes morceaux sur des visuels que je concevais moi-même ; ça leur a beaucoup plu. Rubin Steiner m’a mis en contact avec eux autour d’une bière le lendemain matin, ils venaient de lancer un nouveau label de 45t, une sous-division de Free Complex chez Musiques Hybrides. Seep avait déjà sorti sur Rolax deux 45t, mais par la suite je les ai convaincu de sortir un 33t de Komori en split avec un ami, Toyz ‘R’ Me. C’est comme ça que l’aventure Rolax à débuté pour moi. Mathias Schweizer, Seep et moi avons commencé le développement du label. Léonard était trop focalisé sur son premier album pour y participer activement mais il a réalisé le mastering de mon premier maxi sur Rolax. Je me refusais à ne sortir que nos faces B, nous voulions mettre en avant le rapport entre graphisme, vidéo et musique sans se soucier des modes, nous savions que beaucoup d’artistes pourraient y trouver un poumon pour y faire respirer des oeuvres atypiques et une boite crânienne pour y faire des barbecues. Je pense que c’est notre coté « vrai freaks qui font de vrais choses » et une direction sans concession qui a séduit des artistes comme Dino Felipe, Kovo ou Computer Truck, par exemple. Un engagement au delà de la musique electro pure et dure et le fait de privilégier le live, les machines et l’improvisation nous à fait connaitre même si nous adorons faire danser les monstres jusqu’à 6h00 du matin lors de nos Dj set ou concerts.
Quels sont les activités parallèles de votre petite entreprise ? On associe souvent Rolax aux jouets pour adultes et autres figurines par exemple…
Ce ne sont pas vraiment des jouets. Nous possédons Nekomori qui est une marque de peluches et objets design basée sur des personnages originaux crée par Marion Baylé et moi-même. Il y a des coussins en cuir, des portes-monnaie ailés, des badges et des peluches parfumées vendues dans une boite à sushi. Si tu leur lèches le dos, tu as un goût de chocolat par exemple. Nous développons la marque depuis deux années et vous pouvez trouver nos produits dans de nombreux points de vente à Paris, en province et un peu à l’étranger, également sur des sites de vente en ligne mais le mieux est d’aller sur MySpace. Marion est aussi connue sous le pseudo Marioniks, elle mixe du grime, dubstep, dancefloor avec de grosses bassline. Marioniks a sortie un mix appelé Street pet il y a quelques temps en CDR, et elle joue parfois avec le Rolax Krew pour des Dj set très mouvementés. Le Design des Flyers est primordial chez Rolax. Bientôt, si on nous en donne l’occasion, nous pourrions faire une expo vraiment sympa avec tous ces visuels et ces soirées organisées depuis 2003. Nous continuons de faire vivre l’image grâce au diverses interventions vidéos de Jean Marc Ballée, Lil’ Thibaut, Franjo de Boulez Republic, mais aussi et principalement Mathias de Rolax qui bosse sur un logiciel tournant sur un vieux Mac OS 9.
Vous jouez beaucoup à Paris (Rolax family) et vous avez également amener beaucoup d’artistes lors d’evenements… Lesquels et pourquoi eux ? Quels liens avec Schematic ?
Nous avons fait jouer des artistes qui nous semblaient pertinents au moment opportun ou bien des gens avec qui on avait un lien artistique fort et avec qui on aime bien se lâcher, se lyncher, se mâcher ! Tekilatex de TTC nous avait gratifiés d’un mix 8 bit vraiment dingue et narratif en 2004, Jean Nipon et Dj Wet en duo c’était une vraie tuerie. Die2Die, quant à elle, mariait des styles improbables dans sa sélection, elle m’a fait ensuite rencontrer Dino Felipe et Melba de Finesse + Runway (Schematic). Je ne les connaissais que via la messagerie de MySpace. J’ai joué avec eux en tant que Dj pendant leur live, un grand délire pété et dancefloor ; c’est au cours de la virée chimique qui a suivi cette soirée que j’ai noué une solide et sincère amitié avec eux. J’ai décidé de m’occuper du mastering de l’album de Dino Felipe, Album title ideas, que nous avons sorti sur Rolax. Je suis même allé à Miami lui faire écouter le mastering et il s’est révélé que Schematic était un peu nos cousins là-bas. De belles rencontres avec Otto von Schirach, Nick de 000, et le duo Phoenicia avec qui j’ai joué en home-studio et enregistré jusqu’à épuisement total. Ils connaissaient aussi Dj Maxximus basé à Berlin et m’ont fait écouter ses disques qu’ils avaient sortis sur Schematic, et j’ai su qu’il trippait à fond sur le Grime et le Dubstep fin 2005, tout comme moi. De retour à Paris, je l’ai donc invité à jouer au Nouveau Casino avec Ruff Sqwad, un groupe emblématique de la scène grime londonienne ; on a même fait venir les membres de Human Beatbox pour des intermèdes, une soirée hip-hop / grime assez mémorable, d’autant plus que nous avions sortis le 1er Street CD grime sur Paris en vente chez Katapult et Ekivok. Après la sortie de l’album d’Otto von Schirach sur Ipecac, nous avons fait une soirée en battle, Otto en live et un live inédit qu’on avait conçu pour l’occasion avec Orio G. La soirée s’appelait « Creep o zoïd », le titre d’un vieux film d’horreur des 80’s. A chaque fois nous écrivons des textes à notre sauce avec Orio G. pour les annonces web et autres, celle-là était assez gratinée. Il n’y a pas que l’image, le texte aussi à son importance. Récemment, nous avons fait jouer Peter Digital Orchestra avec [MiNo!ZE] (qui joue sur mon projet The Fawn Obsession) pour une soirée entre house minimale noisy et disco punk ; c’est encore une autre facette de Rolax. On aime la musique, on veut la vivre et faire des sacrifices humains sur l’autel du caisson de basse. Ces soirées ont généralement lieu à Paris mais nous avons aussi fait jouer Toyz ‘R’ Me à Bruxelles, Rolax y avait une résidence, ou encore Kap Bambino au Festival de l’affiche de Chaumont que nous animerons encore cette année. On aimerait faire des Rolax Party partout ailleurs ; ça viendra avec le temps, je l’espère, si nos corps et nos esprits suivent le rythme.
Quelle est votre avis sur les labels francais à la mode comme Kistuné ou Ed Banger ? Comment vous placez-vous par rapport à eux ? Amour-haine ?
Kitsuné, je n’ai écouté qu’une de leur compilation ;je n’accroche pas. En fait, je ne sais pas trop qui ils sont ni ce qu’ils font vraiment. Ed Banger, je comprends ce qui se passe et ce qu’ils font, même si je n’écoute pas régulièrement et que beaucoup de leurs sorties m’ont plutôt laissé de marbre – j’ai déjà passé un ou deux trucs à eux dans mes sets il y a quelques années. J’ai joué avec Krazy Baldhead plusieurs fois, c’est un mec que j’apprécie. Winter nous à dit à quel point il aimait nos artwork, ça prouve qu’on n’est pas totalement autiste les uns envers les autres, il n’y a pas vraiment d’histoire de haine ou d’amour. Il y a des maisons à la mode et nous on ne calcule pas forcément. Le truc, c’est que pour le moment, je trouve que beaucoup de choses qui sortent labelisés « French touch » restent purement esthétique ou mécanique, pas vraiment d’âme et une trop forte envie de venir se caler dans un iPod pour une semaine ou deux. La musique en elle-même passe au second plan, elle va se cacher derrière des bouquets de strings ficelle et je vois partout du faux trash ; les gimmicks actuels ne me paraissent pas si frais que ça dans le renouveau house rock français. J’imagine que le meilleur est à venir ; ce serait bien non ?
Le premier album de Komori a connu un beau succès d’estime et des ventes correctes, puis tu as commencé à éparpiller tes sons et tes activités sur plusieurs projets, y compris en qualité de graphiste et de patron de label…
Mais à part Komori, il y a mon projet avec Seep (I’m With Stoopid) et mon projet guitare (The Fawn Obsession). Chlorine Free et moi sommes aussi en train de préparer un petit live basse / machine pour notre retour sur scène. Le site Komorizone est pour le moment une pilule qui permet d’avoir les infos sur ces projets et il se devra d’être une plate-forme pour donner régulièrement du contenu. Je gère aussi le site Rolax, mais c’est en passe de changer, nous travaillons actuellement à un nouveau site avec une partie vente en ligne, on voudrait que les gens puissent avoir un objet même si ils nous achètent des projets exclusifs en digital. Donc ça va venir, ça se met en place. Ce sera beaucoup plus clean que cette page html peu ergonomique que nous proposons actuellement. Notre Distribution en France est assurée pour l’instant par Musicast, et nous avons aussi un distributeur pour le Web. Egalement des mailorders via Toolbox Records, par exemple. Nous étions autrefois avec Discograph et même Gallimard ou Adnoiseam. Bref, pour la suite, ça dépendra des projets j’imagine…
Propos recueillis par
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