Février 95, Bertrand Biss angloutit d’une traite la dernière BD des Shadoks. Les bestioles de Jacques Rouxel le fascine et l’univers du créateur se prète sûrement bien au multimédia. L’idée séduit immédiatement Jean-Christophe Bardin, avec qui il créé Bidulus Rex pour mettre en branle le projet. Sous la surveillance permanente du dessinateur et avec la collaboration narrative de l’irremplaçable Claude Piéplu, Les Shadoks, le jeu, la promenade voit le jour fin septembre. Aujourd’hui, le CD arrive en 2ème position des ventes à la FNAC. Entrevue avec les concepteurs, Bertrand Bliss (à gauche)et Jean-Christophe Bardin (à droite, donc), qui, vous en conviendrez, profitaient sans aucun doute de certaines prédispositions…
Tête de l’art : Comment avez réussi à faire accepter le projet par le créateur des Shadoks, Jacques Rouxel ?
Bertrand Biss : Le multimédia ne l’intéressait pas du tout. En fait, il adore son univers et ses bestioles. Je pense qu’il a bien senti que notre intention n’était pas de détourner ou d’abîmer son œuvre. Nous sommes des inconditionnels des aventures shadokiennes, mais les dernières diffusion TV remontent aux année 70. Pour réaliser ce CD-rom, nous avions bien pris soin de nous replonger dans cet univers en potassant des BD, en visionnant des vidéo. Jacques Rouxel a bien vu que nous maîtrisions parfaitement le sujet, à tel point que nous sommes tout de suite mis à la tâche avec lui.
Il ne voulait absolument pas léguer ses droits sur l’œuvre et nous n’avions de toutes façons pas les moyens de les lui racheter. Nous avons opter pour une collaboration, lui prenant sa part dans la coproduction.
Pendant un an et demis, nous avons travaillé en confiance totale puisque nous n’avions pas encore signé de contrat.
Vous avez réalisé en parallèle un site sur les Shadoks. Quel est l’objectif ?
BB : Au départ, nous voulions créer un site en déclinaison du jeu. Jacques Rouxel, lui, préférait que l’on conçoive une site général sur les Skadoks. C’est finalement la deuxième solution, plus ambitieuse et plus intéressante que nous avons choisi. Actuellement, il n’y a pas grand chose sur le site, mais petit à petit, nous allons y laisser un maximum d’informations et proposer un forum. On avait aussi imaginer d’offrir de fausse solutions du jeu pour les personnes bloquées. Le site est en ligne depuis 3 semaines et nous recevons déjà énormément de mails d’encouragement.
Vous prévoyez d’autres déclinaisons ?
BB : Nous avons vu la semaine dernière des responsables chez Canal +. Il n’est pas impossible que nous concevions prochainement un espace Shadoks sur le 2ème monde… Nous terminons également l’économiseur d’écran (Mac/PC).
Question fatidique, y aura t-il une suite au CD-rom ?
BB : Jacques Rouxel nous demandait récemment quand est-ce que nous nous comptions commencer à bosser sur la suite (rire). Mais ça ne nous intéresse pas de bêtement réaliser un Shadok 2. Ou alors peut-être en rapport direct avec la 4ème série en préparation pour la TV, diffusée en 1999.
Vous avez des projets multimédias autres que les Shadoks, non ?
Jean-Christophe Bardin : Les idées ne manquent pas, mais un projet comme celui-là, c’est très lourd à gérer. Nous étions seulement cinq personnes sur les Shadoks ! Nos idées tournent autours de nouveaux univers issus de la BD. Nous tenons à nous consacrer exclusivement à des productions qui profitent d’une grande valeur ajoutée.
Travailler en étroite collaboration avec des auteurs, des créateurs, c’est captivant. Enki Bilal, par exemple, ce serait formidable.
BB : Pendant deux ans, on a travaillé sur un sujet qui nous éclatait tellement qu’on a véritablement envie de réitérer l’expérience.
Bilal, oui. Qui d’autres ?
BB, JCB : Hergé ! Non non, je plaisante (rires).
Pourquoi ne pas créer votre propre univers ?
JCB : Oui, tout à fait, c’est envisager. Il faut que ça mûrisse un peu et, surtout, prendre le temps pour s’y consacrer…
Quels sont vos parcours respectifs ?
BB : Mon parcours… euh… je ne sais pas trop comment résumé ça… toi d’abord Jean-Christophe ! (rire).
JCB : J’ai commencé par faire des études de compositions musicales, ensuite… je suis allé vendre des vêtements, puis… euh… j’ai géré des droits audiovisuels. Après… (Bertrand est mort de rire !) euh… après… je me suis occupé des Shadoks, en passant par le SCP. C’est pas dans l’ordre, n’importe quoi ! (rires) Désolé.
BB : Moi, j’ai fait des études de prothèses dentaires, puis du ski acrobatique en compétition pendant trois ans… (Jean-Christophe éclate littéralement de rire !).
Vous êtes sérieux là ?
BB : Oui oui, c’est véridique. Par la suite, j’ai repris des études d’art et de communication à la Fac. En parallèle, pour les financer, j’ai monté une entreprise du bâtiment, je faisais des rénovations de plomberie, d’électricité (Jean-Christophe se gausse toujours joyeusement). Après…
JCB : Ben Décalage !
BB : Ah oui ! Avec ma femme, je me suis intéressé pendant huit ans à la PAO. Nous avons monté Décalage, une société de formation et de production PAO. Nous avons réalisé les premiers CD d’auto-formation sur Photoshop qui ont eu leur petit succès (il part les chercher, puis me les tend).
Ah, d’accord !
BB : Vous en avez entendu parlé ?
Euh… oui oui, bien sûr ?!?!
BB : Chouette ! Voilà, on a ensuite monté Bidulus Rex avec Jean-Christophe pour réaliser le CD-rom des Shadoks.
JCB : That’s all folks !
Pour finir, y-a-t’il des productions multimédias ou ludiques qui vous branche actuellement sur le marché ?
JCB : Nous sommes des fondus de courses autos. En ce moment, on joue assez régulièrement sur Grand prix 2 (PC).
BB : Oui parce que c’est pas trop une ambiance ludique finalement. Le côté réaliste et sérieux de la simulation est assez stimulant. C’est prenant car il est toujours possible de progresser : on commence par gagner des secondes sur chaque tour, puis des dixième… on ne s’en lasse pas !
JCB : On a même un volant. C’est génial !
Propos recueillis par