Tom est un adolescent boutonneux et taciturne, qui s’ennuie depuis que sa famille a décidé de quitter Londres pour s’installer dans la campagne du Devonshire. Renvoyé de nombreux lycées, son père le prend pour un incapable, et semble lui préférer Jessie, sa sœur aînée. Tom s’aperçoit que la relation de Jessie et son père n’est pas normale, et découvre bientôt qu’ils ont régulièrement des rapports sexuels.
Pour son premier film, Tim Roth n’a pas craint de s’attaquer à un sujet délicat et complexe, ni d’en restituer la réalité violente, presque insoutenable à l’écran. La dureté et le dérèglement des rapports familiaux trouvent un écho dans la grandeur sinistre du paysage, l’âpre littoral anglais (excellent travail d’image et belle utilisation du scope par le chef-opérateur Seamus McGravey). Mais The War zone veut être plus qu’un exercice de mise en scène, si probant soit-il, et on ne saurait lui en vouloir. Principal défaut : une lenteur qui cherche à négocier les béances du scénario, inspiré du roman d’Alexander Stuart, qui a signé l’adaptation. En choisissant pour personnage principal le témoin, un garçon inhibé, handicapé dans son rapport au monde, The War zone explore les latences et les non-dits, sans se donner les moyens de les analyser. Du coup, la lenteur et le mutisme qui font la texture du film, loin de délivrer du sens, ressemblent plutôt à une rétention pudique du jugement, un noble et discret faux-fuyant. Film courageux, il montre néanmoins avec force et conviction un inévitable processus de destruction : du père, et de l’innocence de Tom et de sa sœur, qui rentrent tous deux en conflit pour éviter de l’affronter. On aurait aimé un peu plus de complexité chez ce père inquiétant et prendre le temps de le connaître pour mieux comprendre sa monstruosité, puisque tout nous indique qu’il est en apparence normal. La solution du film nous semble du coup un raccourci « œdipien » douteux et peu pertinent.
Si le problème de l’inceste est très fortement ressenti et montré avec une réelle intensité tragique, il n’en est pas pour autant traité. C’est bien dommage, car Tim Roth, dans sa mise en scène comme dans sa direction d’acteurs, fait preuve d’un certain talent. Malgré ses défauts, The War Zone reste un coup d’essai prometteur.