Il flotte dans The Score comme un parfum de déjà-vu : as de la cambriole désireux de raccrocher pour les beaux yeux de sa donzelle ; jeune loup venant proposer un énième et dernier coup, évidemment facile ; succession de complications transformant in fine la formalité en mission impossible, etc. On est en pleine tradition du néo-polar américain, tendance Heat ou L’Impasse, pour citer deux immenses modèles.
Mais Frank Oz n’est ni Michael Mann, ni De Palma, et malgré quelques efforts méritoires, The Score n’arrive jamais à la cheville des films susnommés (écrasantes références, il est vrai). La faute à une romance sentimentale totalement « plaquée » sur le récit policier, et jamais à l’unisson de celui-ci. Autrement dit, De Niro aime Angela Basset et l’on s’en fout royalement ! C’est à croire que Frank Oz, qui signe là son premier polar (après quelques bonnes réussites comiques, Le Plus Escroc des deux en tête), a préféré mettre toute son énergie au service des turpitudes de nos sympathiques canailles, oubliant un peu en cours de route quelques-uns des personnages qu’il avait pris soin de convoquer (Marlon Brando, comme la belle Angela, brille dans un non-rôle total).
Cela dit, il faut bien reconnaître que le réalisateur de In & out ne se sort pas trop mal de l’exercice : l’intrigue de base est assez bien menée, les comédiens sobres et efficaces (De Niro trouve peut-être là son meilleur rôle depuis le Jackie Brown de Tarantino, et Edward Norton s’amuse visiblement à jouer les faux handicapés moteurs). Mais c’est sans doute du côté de l’atmosphère esthétique qu’on ira chercher les meilleures sources de satisfaction. En effet, les nombreuses séquences nocturnes, baignées dans les douces lumières citadines de Montréal, sont très réussies, et Oz fait preuve d’un assez beau savoir-faire dans l’utilisation des variations de mise au point, épatante manière de donner tour à tour l’ascendant aux différents protagonistes. On appréciera enfin la tranquillité du découpage et la sobriété du cadrage, surtout à une période où nombre de réalisateurs clippent à tout va sans jamais faire une once de cinéma. Ne serait-ce que pour cette croyance en un certain classicisme, preuve indéniable de modestie des auteurs, The Score vaut le détour.