A l’origine de cette série B, un vrai prodige : Christian Bale est parvenu à maigrir de manière invraisemblable, atteignant la corpulence d’un squelette recouvert de peau. Pour quelle raison au juste ? A priori, rien de plus que de se plonger dans le personnage principal du film, un insomniaque à l’existence de cafard qui voit soudain des spectres et sa vie basculer dans le cauchemar (attention thriller paranoïaque et schizophrène). A posteriori, cette performance ne vaut effectivement rien de plus, tant le film, sans ce tour de force, demeurerait à peine plus réussi qu’une raclure de fond de tiroir des Contes de la crypte.
Juste après la découverte en long en large du corps cadavérique de Bale, tout se gâte : esthétique Air Wick de mauvais clip gothique (pour faire kafkaïen, enlever tous les tons chauds), intrigue vue mille fois ailleurs, absence de tout élément susceptible de déclencher le malaise. Outre cet aspect aseptisé et désinfecté, cette imagerie figée du genre, le film repompe bien sûr allègrement tous les clichés du genre, d’Hypnose à Insomnia, en réussissant à ne jamais imposer la moindre idée originale. Il faut alors en revenir aux pires artifices possibles, dans une logique papier glacé telle qu’on la voit surtout dans le pire cinéma fantastique espagnol contemporain : baudruche de faux esthète (des beau plans que ne relie aucun mouvement d’ensemble), horribles clins-d’œil pour beaufs en manque de crédibilité (gros plan de 30 secondes sur un livre de Dostoievski), etc.
La structure est logiquement ce qui énerve le plus, avec sa façon de faire gonfler un suspense de trois tonnes pour le crever dans les derniers plans. Logique de la révélation, du spoiler pour cinéphages boutonneux, où tout se résume à des arguments de mauvais court-métrage : le truc, la bidouille du petit malin chaussé de gros sabots. Pathétique vision du genre à l’académisme bon chic bon genre, produit opportuniste et frelaté sans la moindre aspérité, ce Machinist n’a même pas le charme d’une méchante série Z. Avec The Grudge il y a peu, mauvaise pioche du moment : le temps est aux contrefaçons d’escrocs prétentieux.