A voir avec quelle régularité elle se dégonfle de film en film, la trajectoire de l’oeuvrette de Raphaël Nadjari n’est pas rassurante. Après Avanim, portrait d’une femme à Tel-Aviv, Tehilim est le second film réalisé par le cinéaste en Israël. Place cette fois à Jérusalem et ses petites collines ocres et verdoyantes. Le pitch : une famille éclate à la suite de la disparition mystérieuse du père lors d’un léger accident de voiture. Les générations s’opposent entre retrait dans la foi et tentatives de conjurer le grand vide inquiet qui s’installe. Nul doute que l’urbanité new-yorkaise, la mélancolie lounge qui faisait le charme des premiers films de l’auteur (notamment The Shade et, dans une moindre mesure, I am Josh Polonski’s brother) n’a pas trouvé dans ce qui semble pourtant être un sincère questionnement identitaire la voie d’un réel accomplissement artistique. Brutal retour de réalisme, sobriété affectée de chaque plan, il semble que le syndrome « je suis un auteur » ait doucement étouffé le talent du cinéaste.
Les plans s’étirent, les cadres se figent, les scènes s’allongent lourdement (le gamin rentre à la maison et se fait un sandwich : dix minutes chrono). Problème, rien ne se passe : la mise en scène a beau surjouer la conjuration du vide, l’impression de voir une forme rester ainsi au point mort durant plus des deux tiers du film ne produit que rejet et distance. La faute sûrement à cette froideur forcée du point de vue – attention étude clinique – bien éloignée de la subjectivité envoûtante et torpide des premiers films de Nadjari. Pire encore, la raideur fière de la réalisation contredit en permanence ce que le sujet appelle d’attentisme fébrile et de puissance d’écoute. Que Tehilim ait été l’un des films les plus faibles d’une sélection cannoise 2007 de haute volée n’est évidemment pas le plus grave : ce qui déçoit le plus ici, c’est cette impression de gâchis de la part d’un cinéaste arrivé on ne sait trop comment dans un tel fossé artistique.