Le jeu de mots de son titre résume assez bien l’ambition de cette pesante comédie à la française : faire d’un espace a priori uniforme un champ d’une grande richesse sonore. Jeff (Sacha Bourdo, échappé du Western de Poirier), le héros du film de Thierry Boscheron, est donc un musicien qui, en attendant la reconnaissance artistique, travaille comme agent d’entretien sur une autoroute. Dès son premier jour de labeur, Jeff se fait arracher l’oreille gauche lors d’un malheureux accident. Pourtant, il continue étrangement à entendre à distance, son univers auditif se trouvant ainsi dédoublé. La greffe étant possible pendant seulement quatre heures, le temps presse pour retrouver le mystérieux appendice…
Démultiplier les pistes sons n’est pas forcément un gage de qualité, et même si les prouesses effectuées par les mixeurs nous laissent parfois pantois, on ne peut en dire autant des ingrédients poussifs mis en œuvre pour tenter de nous divertir. Les relents de Lynch mal digéré sont particulièrement accablants. OK pour le coup de l’oreille perdue (cf. Blue Velvet) qui n’est pas une mauvaise idée de recyclage, mais la galerie de personnages tous plus décalés les uns que les autres atteint très vite les limites du supportable. Devant une veuve qui vient se recueillir sur le périmètre autoroutier où son mari a trouvé la mort, une doctoresse (Marie-France Pisier, qui s’en tire sans trop de dommages) excitée à l’idée de greffer sur Jeff une oreille en peau de rat ou encore des séminaristes transportant une statue de la Vierge, une seule question nous obsède : mais quand va donc se pointer ce putain de générique de fin ?! Mention spéciale aux deux comédiens vedettes, avec, chez les hommes, Sacha Bourdo, son bonnet péruvien et sa diction d’attardé, et chez les femmes, notre grognasse nationale, alias Aure Atika, dont le jeu ne s’améliore pas au fil des films. Avec des acteurs aussi minables, Thierry Boscheron aurait mieux fait de se contenter d’une bonne vieille départementale ; et encore…