Sixième film du Coréen Lee Myung Se, cinéaste de renom dans son pays mais encore méconnu à l’étranger, Sur la Trace de serpent est un polar ultra-stylisé qui se résume à une course poursuite entre un flic intrépide, l’inspecteur Woo, et un criminel pour le moins énigmatique, Chang. Après que ce dernier ait commis un meurtre au nez et à la barbe de la police, Woo et son équipe interrogent en vain tout ce que la ville compte de malfrats. Ils se rendent ensuite dans un port, Inchon (un haut lieu du trafic de drogue en Corée, paraît-il), chez la petite amie du tueur. Mais Chang s’enfuit à nouveau. La poursuite du criminel entraîne alors le policier à travers le pays.
Lumière bleutée, rideaux de pluie filmés au ralenti, courses-poursuites interminables à pied ou en voiture, Sur la trace du serpent délaisse rapidement son intrigue bidon pour se concentrer exclusivement sur l’aspect visuel. Les rares tentatives pour introduire un semblant d’intrigue psychologique tombent dans les poncifs les plus éculés (vague flirt avec la copine du tueur, mort du coéquipier, etc.). Lee Myung Se, soit-disant chef de file d’un renouveau du cinéma coréen, a beau citer les nymphéas de Monet comme référence et vanter l’énergie cinétique comme unique sujet du film, il ne parvient qu’à nous convaincre -s’il en était encore besoin- que le seul raffinement des images ne saurait tenir lieu de forme cinématographique. Les personnages ne comptent jamais en tant qu’êtres humains mais ne sont là que pour dynamiser l’action, transformant par la même les premiers rôles en simples figurants. Et les changements de décors ne dépaysent pas plus, entièrement soumis à la logique gratuite du film.
Totalement privés de l’élément dramatique sans pour autant convaincre sur le plan formel, l’action et le mouvement, censés être au premier plan des préoccupations du cinéaste, n’engendrent que l’ennui. Une fois démasqués les vains alibis formalistes de Sur la trace du Serpent, on hésite à qualifier celui-ci de polar esthète sans intérêt ou simplement de mauvais film d’action.