Carton surprise aux Etats-Unis, Save the last dance part d’une belle idée : confronter deux personnages aux antipodes (une jeune fille blanche et bourge, un ado noir et fauché) et les réunir par le biais de la danse. Sara (Julia Stiles, clone féminin de Leonardo Di Caprio) ambitionne de devenir ballerine, mais la mort de sa mère met fin à son rêve. Elle déménage alors chez son paternel et se retrouve dans un lycée composé presque exclusivement de blacks. Lui sera-t-il possible de concilier l’art des pointes (son moi profond) et le rythme du hip-hop (la clé de son intégration) ? Son prince charmant et initiateur répond au nom de Derek (Sean Patrick Thomas), danseur et intello émérite -après le héros écrivain et basketteur de A la rencontre de Forrester, la tendance hollywoodienne est aux Noirs multi-talents…
Le problème majeur de Thomas Carter réside dans son incapacité à filmer correctement la danse, seul sujet de son troisième long métrage. A force d’en rajouter dans le style clippesque (cadres obliques, montage archi-découpé), le réalisateur en oublie l’essentiel : la beauté simple du mouvement nu, le plaisir que l’on peut éprouver à la vision d’un corps qui bouge bien, sans recours aux artifices ou aux effets de manche. Du coup, les supposés climax de Save the last dance (l’audition de Sara pour intégrer une prestigieuse école de ballet, ses déhanchements bitchy dans le club hip-hop) tombent à plat, faute de puissance musicale -la B.O. est à chier- et de modestie visuelle. Ne restent alors plus que les rudiments d’une bluette sentimentale quelconque ; love-story interraciale et clichés qui en découlent. Grâce à son ambition, Derek échappe à son devenir caillera, tandis que son amour pour Julia triomphe d’un environnement méfiant et limite xénophobe. On est contents pour eux, mais on aurait préféré les voir davantage exulter sur la piste.