Clive Cussler : est-ce qu’un cinéphile au monde se souvient de ce nom? La dernière fois que l’écrivain de best-sellers épais qui protègent le visage du soleil l’été et cale les armoires l’hiver a été adapté au cinéma, c’était il y a vingt-quatre ans, pour La Guerre des abîmes. Le film (comme le livre), sur fond de renflouage du Titanic et de guerre froide, est oubliable. Mais pas le fait qu’il soit resté dans l’ombre des Aventuriers de l’arche perdue, sorti dans les salles américaines le même été.
Un chasseur de trésor sachant manier le fouet et la vanne part à la recherche d’un vestige américain dans un désert africain. Dirk Pitt, le héros de Sahara, doit beaucoup à la première aventure d’Indiana Jones. Sauf qu’on y croyait un minimum, chez Spielberg, y compris au concept d’une Arche d’alliance traquée par des nazis. Chez Brett Eisner, c’est un tantinet plus compliqué. Et ceci, dès la séquence d’ouverture, où l’on apprend qu’un bateau américain flottant pendant la guerre de Sécession s’est mystérieusement retrouvé ensablé en plein Sahara et que seul un ancien Marine féru d’archéologie peut le retrouver.
Après Benjamin Gates et quelques autres, Dirk Pitt marche donc sur les traces du dernier grand héros du cinéma d’aventures américain. Curieusement, on peut se réjouir qu’il ne fasse pas tout à fait la même pointure. Revu selon les critères du blockbuster actuel, Sahara au moins regarde son époque en face. Autant Les Aventuriers de l’arche perdue avait toujours l’oeil dans le rétroviseur vers le charme des serials d’antan, autant ce film se complait à incarner des valeurs de son époque : non content d’avoir un non ridicule, Dirk Pitt n’a pas toujours les mains propres, prêt à tout faire pour barboter un peu de pognon par-ci et par-là ou truander son monde. Comme la mise en scène et le scénario, au fond, putassiers, cherchant uniquement à satisfaire un cahier des charges simplifié : faire exploser un maximum de choses en deux heures de temps. En regard, les coïncidences éléphantesques du récit, le poussiéreux discours colonialiste qui le nourrit et l’inénarrable potiche féminine qui le décore ne sont que peccadilles.
Il y a vingt-cinq ans, Tom Selleck, Michael Douglas ou Kevin Costner auraient vendu corps et âme pour décrocher un film pareil. Aujourd’hui, c’est Matthew Mc Conaughey qui s’y colle. Sahara ne changera probablement pas son image de perpétuel wannabe-a-star auprès d’un public qui continue de l’ignorer. Dommage, car il apporte ici une plus-value, une espèce de second degré, clin d’oeil permanent vers le spectateur pour lui signifier que personne n’est dupe dans cette entreprise. Son duo avec Steve Zahn (décidément le meilleur side-kick que le cinéma américain s’est trouvé depuis très longtemps) permet de ne pas ronfler pendant le film, tant il a des airs de sabordage rigolard.
Il paraît que Clive Cussler a été un véritable chasseur d’épaves dans le civil, frayant plus ou moins avec des barbouzes américains de tous bords. Même s’il vaut mieux voir Sahara en DivX lors d’une soirée pizza-Coca entre potes que de perdre 8 € dans un multiplexe, après une telle rigolade, on se prend à réver d’un biopic du bonhomme. Hésitation sur le choix du réalisateur : Michael Bay ou les Frères Wayans ?