Difficile de trouver comédie française plus emblématique que Poupoupidou, dont les folles ambitions souterraines le disputent à l’éternel complexe d’infériorité de notre terroir face au grand frère américain. Emblématique, puisque ce complexe est traité frontalement : écrivain à succès, Rouve rêve d’égaler James Ellroy et est obsédé par la mort mystérieuse d’une miss météo jurassienne qui se prenait elle-même pour la réincarnation de Marilyn. Formellement, le film pique tout aux frères Coen : personnages savoureux (dans l’intention, du moins), goût du pastiche, Mouthe, « la ville la plus froide de France » en lieu et place des plaines enneigées de Fargo. Chaque emprunt est un clin d’oeil officiel, qui fait sciemment glisser l’ensemble dans un second degré ad hoc : rien n’y est vraiment sérieux, bien qu’il soit demandé de se prêter au jeu un minimum, le film n’ayant pas la puissance nécessaire pour délirer à fond les manettes.
Le titre résume cet entre-deux, invoquant autant le glamour Monroe que son envers franchouillard, donc rigolo-moisi. Le film s’y tient, aussi bien molletonné par sa doudoune parodique que prisonnier de son pitch, appuyant chaque fois sur le même ressort (provincial donc dépressif), sorte de pub trop longue dont on devine la conclusion trop vite : la conscience douce amère donc charmante de la plouquitude tricolore. Rouve la joue comme ça, ouvertement flapi, au pire étriqué quand il faut amuser la galerie, Jean-Claude Dusse en plus mou, plus tellement comique, à l’image de l’acteur : on le voit beurrer ses tartines, passer pour un Parisien vis-à-vis des gendarmes, glander dans sa chambre d’hôtel, rouler en scooter de pouffiasse sur une route enneigée. En voilà une parodie ratée par Poupoupidou, sans distanciation aucune du naturalisme à la française, cette bonhomie préfabriquée, insoutenable manie du meublage pittoresque sous couvert de chaleur humaine (le running gag piteux de la tenancière de l’hôtel gothique). Sophie Quinton (la miss météo), s’en sort mieux quand même : ringarde – pas le choix -, un peu vulgaire quand l’érotisme monte d’un cran – pas le choix, non plus – mais joliment gracile et plus mystérieuse que le film l’avait prévu.