Avec cette adaptation d’un livre de Gabriel Garcia Marquez, le cinéaste mexicain Arturo Ripstein retrouve sa thématique habituelle de la circularité, et son corollaire, l’enfermement. Depuis vingt-sept ans, un vieil homme (Fernando Lujan) attend sa pension de l’armée. Sa vie n’est faite que d’une répétition de gestes ; attendre le bateau du vendredi qui amène le courrier, aller à la poste, s’arrêter au café, converser avec son coq, etc. Avec sa femme asthmatique (Marisa Paredes), ils crèvent littéralement de faim. Le seul espoir de cette existence misérable est un coq de combat, qui appartenait à leur fils décédé, et dont les victoires hypothétiques devraient leur assurer un avenir meilleur. Mais l’avenir n’existe pas, la pension n’arrivera jamais, il ne restera plus qu’à « bouffer de la merde », selon les dernières paroles du colonel.
Le précédent film d’Arturo Ripstein, Divine, présenté l’année dernière à Cannes et jamais distribué en France, semblait conclure un cycle baroque basé sur l’accumulation, la surcharge kitsch à l’intérieur des plans. Ici, Ripstein, cherche le dépouillement : le combat digne de deux vieillards cherchant à survivre malgré les injustices, malgré la faim, malgré la maladie. Seuls les miroirs présents dans de nombreux plans traduisent l’enfermement des personnages qui pataugent dans la boue de ce petit village perdu au fin fond de l’Amérique Latine.
Hélas, sa description de la vie monotone du colonel ne convainc pas réellement. Les multiples conversations du colonel avec son coq, ses allers-retours, finissent par lasser et provoquer l’ennui. Le train-train quotidien du colonel est modifié par des changements infimes, la vente du coq, l’achat d’une paire de chaussures, mais aucun d’eux n’arrive à provoquer un certain intérêt chez le spectateur. Seule la description émouvante d’un vieux couple aux relations pleines de tendresse, à défaut de sexe, et l’interprétation remarquable de Marisa Paredes -méconnaissable en vieille femme souffreteuse- sauvent le film.