Le patatras de l’année. Wong Kar-wai se ridiculise comme un bleu avec cette panouille pas possible sur fond de pâtisserie et de bisous de posters. On se demande bien ce qui a amené le Hong-Kongais à s’embarquer dans ce nanard pour fifilles, d’une ineptie abyssale. L’envie de tourner avec Norah Jones, s’est-il justifié à Cannes (2007), où le film avait fait office d’ouverture. La chanteuse prouve, par sa prestation banale, que ce film décidément n’avait guère de nécessité. Sauf à montrer un cinéaste en pleine déconfiture se livrer à une vaine baignade dans une mare d’imageries photographiées à la bave par Darius Khondji. Norah Jones incarne une fille larguée par son chéri qui, un soir de déprime et de brouillard, entre dans le snack tenu par Jude Law, bellâtre absolument parfait, personnage dont le moindre détail est minutieusement étudié pour le rendre photogéniquement irrésistible, et filmé à l’avenant. Il la console, royal. La fille décide, plutôt qu’une cure de nutella, de s’en aller parcourir une Amérique clicheteuse à souhaits et filmée comme une mauvaise pub. Elle raconte ses rencontres (présentées comme une série de courts-métrages indignes du festival de Clermont-Ferrand) au beau Jude resté touiller sa marmelade dans son troquet. Vont-ils se retrouver ? La belle surmontera-t-elle son chagrin ? Le beau et solitaire pâtissier délaissera-t-il la farine pour revenir dans la grande cuisine de la vie ? L’amour triomphera-t-il des épreuves de la vie qui est pleine de surprises comme un clafoutis est plein de cerises ? Qui reveut du cake ?
Ces nuits myrtilles, qui seraient une lecture anémiée et cul-cul la praline de Chungking express, forment un film tarte, clinquant, creux et niaiseux comme tout, beau comme un clip de Whitney Houston, où Norah Jones et Jude Law philosophent au dessert et accouchent d’une morale style « la vie, c’est comme une tarte aux myrtilles ». C’est drôle pendant cinq minutes, cette séance de courrier du cœur de Jeune & Jolie, mais à voir ce déluge de gadgets narratifs améliepoulinesques, ces poses d’acteurs à faire rêver les prépubères des années 90 et surtout la crétinerie de l’ensemble, on a vite honte pour Wong Kar-wai. Certes le cinéaste a toujours travaillé une matière à la limite de la bluette et du nunuche, mais il en tirait une réelle flamboyance. Là, rien à sauver, ni les roucoulements des oisillons de l’amour, ni la mièvrerie kitsch et surtout pas les âneries débitée au kilo par les personnages, cette avalanche de dialogues visiblement piochés dans le journal intime écrit à l’encre turquoise d’une gamine de treize ans. C’est peu dire qu’on en veut à Wong Kar-wai, cinéaste aimé jusqu’à présent, de s’être empêtré dans cette grossière caricature de son cinéma et de son style.