« On the road again », la vie d’Ada (Kimberly J. Brown) est gouvernée par les mariages catastrophiques et les liaisons orageuses de sa mère Mary Jo (Janet McTeer). A chaque séparation correspond un départ, une nouvelle ville, de nouveaux motels et une soi-disant nouvelle vie qui se réduit en réalité à une éternelle fuite en avant. Tumbleweeds débute par une rupture violente, Mary Jo plie bagages, emmène sa fille vers un « ailleurs » qui immanquablement sera le lieu d’une répétition des mêmes erreurs.
Un tel résumé laisse penser à un film misérabiliste de plus, l’errance d’une mère instable qui transbahute sa fille à travers l’Amérique au gré de ses aventures amoureuses. Le film commence effectivement comme un road movie mais rapidement son enjeu se déplace. L’arrivée à Light Beach, une petite ville de Californie, ne fait que renforcer le désir d’Ada d’une permanence, d’une stabilité dans son existence. Pour sa mère, elle ne peut être qu’une étape de plus, une halte supplémentaire avec un autre homme dont elle finira par se séparer. Inévitablement le même schéma se reproduit Mary Jo rencontre un homme, le quitte au bout d’un certain temps et décide de partir à nouveau, mais Ada refuse cette fois de l’accompagner. Le cinéaste analyse subtilement les rapports de ce duo mère-fille et évite toutes les facilités d’usage. Ada a acquis précocement par la force des choses une certain maturité mais elle ne joue pas le rôle de la maman ; Mary-Jo, par certains aspects, est une adolescente attardée mais elle ne se cantonne pas au rôle de la mère-copine. Plutôt qu’une inversion des rapports parent-enfant, le réalisateur opte pour une complicité particulièrement attendrissante et fondée sur un amour mutuel sincère. Les deux interprètes sont particulièrement justes ; malgré les échecs répétés, la mère fait preuve d’une énergie désarmante, la fille est à la fois lucide et aimante. Tumbleweeds, avec peu de moyens et grâce à une interprétation remarquable, prouve que le cinéma indépendant est encore capable de se renouveler.