N’était le double opportunisme d’une telle sortie, on serait au moins un peu surpris de voir débarquer en salles un doc aussi insignifiant et vilain que celui-ci. Mais l’opportunité était double, donc. Pour Metropolitan, il s’agissait probablement d’accompagner la sortie toute proche de Chapitre 27, biopic consacré à Mark Chapman, l’illuminé fou de Dieu et de Salinger qui envoya Lennon rejoindre Elvis un jour de décembre 1980. Cohérence totale du package : le film, on y revient la semaine prochaine, est un nanar sentencieux et boursouflé. Les USA contre John Lennon tombe aussi à pic pour grossir d’un pavé l’édifice actuel, déjà pesant, du revival 68. Il s’y agit en effet, pour dynamiser un peu la soirée diapo sur la carrière du Beatles à lunettes, de saisir celle-ci (vaguement) au prisme de l’agitation gauchiste US des late 60’s.
Soit un montage télé (production VH1) assez ingrat enfilant comme des perles sur un collier beatnik une pelletée d’archives vues et revues (l’affaire Beatles vs. Jésus Christ, le bed-in avec Yoko, les marches étudiantes…), une grosse poignée de faux scoops (Lennon copinait avec les yippies, fut mis sur écoute par Hoover, mit quatre ans pour obtenir sa carte verte…), et une avalanche de banalités servies par un casting de luxe (Chomsky, Vidal, Angela Davis, parmi une bonne trentaine d’interviewés, 15 secondes chacun – putain, mais où est Greil Marcus ?), le tout sur fond de compile des plus grands hits du working class hero.
La galerie de portrait, bien sûr, n’est pas tout à fait inintéressante, offrant de prendre des nouvelles de John Sinclair (ex-manager du MC5 et président du White Panther Party, soutenu par Lennon à l’occasion d’un concert fameux quand celui-ci faut jeté en prison pour une paire de joints proposés par erreur à des agents du FBI en civil), de Bobby Seale (cofondateur des Black Panthers) ou de Mamie Yoko, qui a mis un joli chapeau pour l’occasion. Reste que le manque de perspective solide de tout ça, tolérable au hasard d’un zapping sur le câble, fait un peu tâche en salles. Le film se conclut sur un aberrant tour de passe-passe, préparé par la proposition aguicheuse du titre. 1980, Lennon se fait descendre, mais le film s’abstient de nommer Chapman, pour tendre le mic’ à Mamie Yoko, qui conclut : « Ils ont voulu tuer John, mais son message est toujours vivant ». L’imaginaire du complot, décidément à la mode. Ça tombe bien, on lui consacre un dossier dans Chronic’art #44, toujours en kiosque.