Les petites joies font les grands bonheurs, paraît-il. Ça ne fait pas toujours des grands films, certes, mais Les Petites couleurs, au ton décalé, distille un charme désuet, une candeur nostalgique et naïve, qui arriverait presque à réchauffer les coeurs. Au Galaxy Motel, relais routier perdu au bout de nulle part, avec l’autoroute pour seul horizon, toutes sortes de personnages se côtoient. Il y a les routiers bourrus mais sympas, Vladimir le VRP à l’élégance très 50’s, Lucien, le beau gosse romantique, Max le cuistot et Fanny, sa femme, enceinte. Maîtresse de ce lieu de vie plus que de passage, Mona (Bernadette Lafont), taulière accro au Ranch de l’amour -un soap-opéra musical-, tient son petit monde réjouit et fait tout pour le garder. Une nuit, Christelle (Anouk Grinberg), coiffeuse paumée au bord du divorce débarque avec une drôle de machine, « Belles boucles », et met des couleurs pas que sur les murs vieillots du Motel.
L’idée n’est pas vraiment nouvelle : un personnage largué change radicalement de vie pour mieux se retrouver. Entre les deux, le parcours initiatique habituel : les larmes, le deuil, l’aide des autres, la reconstruction avec au bout, peut-être, la promesse d’un bonheur tout nouveau. Anouk Grinberg incarne ce personnage qui se transforme sous nos yeux, à la fois émouvante lorsqu’elle n’en fait pas trop et énervante quand elle joue les femmes-enfants aux intonations de gamine. Quant à Bernadette Lafont, elle est parfaite dans le rôle de Mona, veuve enjouée et pleine de surprises. Réalisatrice de nombreux documentaires et de quelques longs-métrages passés inaperçus, Patricia Plattner fait ici preuve d’un ton personnel et décalé avec, par exemple, l’insertion de scènes musicales dans le film qui apportent un contrepoint audacieux. Dommage que l’ensemble des Petites couleurs ne soit pas bâti sur cette exigence d’originalité car beaucoup trop de scènes restent prévisibles dans cette fable optimiste à laquelle on aurait bien aimé adhérer.