Chantre de l’anti-capitalisme, adepte convaincu de la distorsion, Bill Plympton, c’est l’anti-Disney par excellence. Ce vilain petit canard du dessin animé n’a certainement jamais entendu parler de numérique, quant au terme mièvrerie, il ne sait tout simplement pas ce que cela signifie. S’il fallait absolument lui trouver une parenté, on le qualifierait volontiers de proche cousin des frères Farrelly -l’imagerie gore en plus- largement influencé par le surréalisme de tonton Topor. Un mélange détonnant à l’origine de petites merveilles en format court, exemples parmi tant d’autres : 25 ways to quit smoking (1989) ou encore Surprise cinema (1999), une parodie trash de la caméra invisible. Lorsque le métrage s’allonge c’est une autre histoire…
S’attaquant à l’exploitation mercantile de la conquête spatiale, Bill Plympton raconte les mésaventures de l’astronaute Earl Jensen. Perdu dans l’espace, à cause d’une diabolique manoeuvre du non moins diabolique Dr Frubar, Earl revient miraculeusement sur terre 20 ans après le décollage de sa fusée. Il ne revient pas seul ; à sa suite débarque un vaisseau transportant cinq mutants de l’espace. D’étranges créatures qui sont en réalité les descendants des animaux de laboratoire envoyés par Frubar dans le Cosmos. Seul parmi les étoiles, Earl a fricoté avec ces cobayes et de cette fornication contre nature sont nées ces Pokémons dégénérés. Maintenant ils n’ont qu’une idée en tête : détruire le Dr Frubar qu’ils savent responsable de la dérive de « papa » dans l’espace.
Cette histoire de vengeance conduit à un jeu de massacre jouissif mais, il faut bien l’avouer, qui manque cruellement de rythme. Plus qu’un long métrage Les Mutants de l’espace est une succession de sketchs hétérogènes à la réussite plus ou moins affirmée. De ce méli-mélo un peu foutraque, on retiendra quelques îlots de bonheur, particulièrement l’épisode sur la planète des nez dont la splendeur renoue avec l’inépuisable poésie du Topor de La Planète sauvage. L’univers de Bill Plympton souffre de quelques ratés, mais ce sont ces imperfections mêmes qui font qu’on l’apprécie. Entre un Mutants de l’espace brinquebalant, vaccin idéal contre la mondialisation de l’animation, et un énième Disney régurgité par une service marketing omnipotent, notre coeur fait tout sauf balancer.