D’où vient le sentiment de torpeur qui nous envahit, disons, dès la dixième minute du premier long-métrage de Brian Skeet ? A-t-on déjà compris que le film ne tiendrait pas les petites promesses de son titre et qu’il y aurait encore moins de « folies » ici (« misadventures » en v.o.) qu’il n’y en a dans la vie rangée des héros de Friends, sitcom américaine à la mode ? Sans doute. Pourtant, cela ne tient pas à la mignonne mais pudique Parker Posey. Elle interprète avec énergie Margaret, une jeune romancière new-yorkaise qui entreprend l’adaptation du journal intime d’un libertin français du 18e siècle. Ce travail réveillant sa libido engourdie (elle est fidèle à son mari depuis sept ans et ça ne bondit plus sous les draps), la jeune femme essaye à tout prix de se dévergonder, sans jamais y parvenir. Le conflit incompréhensible qui anime l’héroïne (cherche-t-elle à tromper son mari pour se venger de ses soi-disant infidélités ou cherche-t-elle à s’émanciper afin de « mieux » écrire les scènes de coucheries de son roman ?) ou encore la mollesse de la satire de l’élite culturelle new-yorkaise jouent sans aucun doute un rôle dans l’affadissement du film.
Mais il y a autre chose. Ce qu’on cherche à nous « refourguer » ici, c’est un âge d’or perdu, l’atmosphère loufoque et distinguée des comédies américaines des années 30, les comédies « champagnes » de Mitchell Leïsen. Sont donc convoqués les seconds rôles de composition (l’agent homosexuel, la copine extravertie, le dentiste obsédé, le français de service). Or, on ne remplace pas sans risque un Edward Everett Norton (l’acteur efféminé de second plan de tous les films de Lubitsch) ou un Charles Boyer (le français d’Hollywood) par un inutile Patrick Bruel. Il y aussi, toujours pour « faire genre », les décors de standing (grand appartement, salons de réception), l’éclairage vaporeux et surtout les dialogues « piquants » : Margaret parle trop. Les comédies des années 30 (un peu à cause de la censure, beaucoup parce que c’était bien plus signifiant) savaient l’art de la suggestion : dans l’univers de Margaret, les mots n’ont qu’un sens, le sens propre. Un chat est un chat, on dit « baiser » et « testicules » et c’est le meilleur moyen de ne parler que de libido et jamais de désir.
Comme presque à chaque fois, dans ce type d’opération de résurrection d’un âge et d’un genre supposés idéaux, la mayonnaise (artificielle) ne prend pas. C’est peut-être qu’on a oublié le liant.
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