Le Temps d’un automne traverse à peu près toutes les variations possibles du college movie avant de se fixer, péniblement et après une bonne heure d’efforts, sur l’un d’eux. Tout commence avec une brutale séance de bizutage (pour faire partie de la bande, un nouveau doit effectuer un plongeon au péril de sa vie), comme dans un mauvais slasher avec fantôme vengeur et assassinat en cours de biolo. Puis le film tente, non sans panache, un télescopage improbable entre deux figures majeures de la teen attitude. D’un côté Landon, le chef de bande, beau gosse « popular » à l’intellect profond (bagnoles, filles, bières), de l’autre la fille du révérend, Jamie, une grenouille de bénitier en salopette et socquettes, première de la classe et de la chorale, passionnée d’astronomie et bénévole à la Croix-Rouge, tout ce qu’il y a de plus vierge. Peu à peu, et parce qu’on n’a pas le choix, on se fait à l’idée d’une idylle entre ces deux extrêmes de l’échelle collégiale, avec pour certitude que l’un et l’autre vont se révéler, s’échapper de leur infernale caricature et s’envoler main dans la main vers une synthèse dialectique des contradictions qu’ils incarnent. Tout nous y incite : Landon se met au théâtre et au soutien scolaire, tandis que Jamie, interprétée par Mandy Moore, chanteuse-starlette pour gamines, laisse entrevoir, lors de deux scènes chantées (dont une séance de gospel transformée en amorce de clip MTV), un potentiel de clone de Britney Spears que ses jupes plissées peinent de plus en plus à masquer.
Or, contre toute attente, Le Temps d’un automne s’engage dans l’exploration d’une troisième voie, celle du mélodrame d’un autre âge façon Love story : Jamie annonce à son boy-friend qu’elle est atteinte d’une leucémie, ce qui condamne leur romance à ne pas dépasser le stade de la bluette adolescente. Dès lors, le film peut donner libre cours à son romantisme échevelé, Landon, « rebel with a cause », filant à travers la nuit dans son coupé sport, rock’n roll à fond les enceintes et les yeux embués de sanglots. Le Temps d’un automne est un tire-larmes juvénile plein d’entrain dont le seul signe de modernité est son inclination à la dépense (Landon construit un télescope à sa belle en 48 heures chrono, fait des pieds et des mains pour qu’elle accomplisse tous ses rêves avant le trépas). Pour le reste, le film est animé par une morale de boy-scout et se réfère à l’idéal inaccessible d’un monde où les filles bien-comme-il-faut ne songent qu’à se marier dans une église enchantée et les caïds ne sont pas aussi crétins qu’ils en ont l’air.