Pour ses débuts à la réalisation, Antonio Banderas démarre fort ; il nous offre deux films pour le prix d’un. Le premier nous narre l’été initiatique de Peejoe (Lucas Black), un enfant de douze ans qui va se battre contre la ségrégation en Alabama dans les années 60. Le second est le parcours fou fou de Lucille (Melanie Griffith), femme au foyer qui rêve de devenir star à Hollywood. Le lien entre les deux ? Lucille est la tante de Peejoe. Cette parenté permet donc au réalisateur d’effectuer un va-et-vient entre ces deux itinéraires parallèles. Pendant que Lucille se balade avec la tête de son mari dans un carton à chapeaux (le cher époux s’est en effet opposé à son départ, elle a donc dû le supprimer), gagne une fortune au casino et finit même par jouer dans Ma sorcière bien aimée, Peejoe se bat contre un shérif raciste, manifeste avec les noirs, fait la couverture de Look, etc.
Bref, les intentions du réalisateur sont on ne peut plus claires : il faut savoir s’émanciper, se libérer de ses chaînes. A l’échelle individuelle, son entreprise n’est pas dénuée de sympathie car il émane de sa ménagère aux accents de Bonnie Parker une certaine folie douce. Par contre, dès qu’elle se place au niveau collectif, son exaltation de la liberté s’alourdit considérablement. L’émancipation du peuple noir est traitée de manière très académique. Sa mise en scène hollywoodienne pur jus -méchants blancs contre gentils noirs, la justice finit toujours par triompher, etc.- ne nous donne qu’une envie : retourner le plus vite possible auprès de Lucille. En d’autres termes, on a non seulement une tête dans un carton à chapeaux mais également un réalisateur qui se retrouve avec le cul entre deux chaises. Tout à la défense de sa thèse anti-raciste, il s’installe tout de même largement et confortablement dans celle du metteur en scène conventionnel et pétri de bons sentiments.