Lointaine cousine new-yorkaise de Bridget Jones, Jessica Stein (Jennifer Westfeldt) est la trentenaire névrosée type. Pour elle, la ronde des rendez-vous ratés semble sans fin ; pas un seul mâle dans tout Manhattan ne lui convient. En désespoir de cause, lassée de ce célibat chronique, elle se décide à répondre à une petite annonce de rencontre. Son auteur pourrait bien être cette introuvable âme sœur -il cite, en effet, son poète préféré, Rilke- seul petit inconvénient, et pas des moindres, l’annonce se trouve dans la rubrique « JF cherche JF ». L’indécrottable hétéro rencontre donc Helen (Heather Juergensen), une hétéro tout aussi indécrottable mais sexuellement bien plus vorace. Cette galeriste branchouille a tout expérimenté, ne manque qu’un seul trophée à son tableau de chasse : une nana.
Deux femmes, plutôt bien de leur personne, s’offrant une petite escapade saphique, a priori, La Tentation de Jessica a tout de l’objet un peu trop calculé surfant sur la vague goudou chic. Et pourtant, si l’on fait preuve d’un tant soi peu d’indulgence, il émane de ce petit film indépendant un charme indicible. Tandis que la plupart des comédies romantiques hollywoodiennes s’essoufflent dès les premières scènes en courant désespérément derrière un âge d’or à jamais révolu, La Tentation de Jessica réussit à investir habilement le genre. Evidemment, il n’est pas question ici de révolutionner la représentation du saphisme à l’écran et encore moins le cinéma mais juste de se livrer à une réflexion light, souvent drôle, (voir les atermoiements de vierge effarouchée de Jessica avant de franchir le pas) sur les préférences sexuelles. Quelque rigides militants risquent de s’offusquer de cette vision résolument apolitique de l’homosexualité -elle se réduit ici à un simple accessoire dramaturgique- les autres, la grande majorité, apprécieront cette comédie new-yorkaise sans prétentions. Et ce n’est pas quelques défauts mineurs -à l’origine le film est une série de sketchs écrits par ses deux interprètes principales et il n’arrive pas à toujours se départir de ses origines théâtrales- qui nous convaincront du contraire. Par souci d’honnêteté, les scénaristes devraient cependant reverser une partie de leurs droits d’auteur à Woody Allen ; l’esprit du plus célèbre des névrosés de Manhattan planant en permanence sur le film. Jessica Stein est certes un peu trop sous influence mais on la préfère de loin à toutes ces Bridget Jones hétéro-hystéro.