On s’ennuie ferme, et c’est peu de le dire, devant cette très peu subtile brochure d’école signée Radu Mihaileanu (Va, vis et deviens ; Le Concert), et visant à expliquer, sans trop rentrer dans les détails, la noble cause du féminisme arabe. Dans un petit village du Maghreb, les femmes vont depuis longtemps chercher l’eau dans la montagne, sous l’œil ricaneur des hommes qui sirotent le thé à l’ombre de la terrasse du bistrot. Bientôt l’une d’elles (Leïla Bekhti), parmi les plus jeunes, incite ses consœurs à se rebeller, mais au lieu de la grève des seaux d’eau, elle propose la grève de l’amour : chasteté obligatoire, tant que ces messieurs ne daigneront relever leurs manches. Présenté comme une fable, La Source des femmes n’en conserve que la moralité, et ignore tout ce qui pourrait l’écarter de sa thèse – à laquelle se raccordent toujours, avec une désarmante balourdise, les rares intrigues secondaires. Jamais il ne se défait de son affreuse littéralité, ni de sa pesanteur éducative, sous l’autorité de laquelle les personnages, pauvres faire-valoirs, n’en finissent pas de prendre des poses dans l’effort, dans la joie, dans la tristesse. Affligeantes caricatures du côté des femmes (martyres) comme du côté des hommes (égoïstes), et la plupart du temps piètrement incarnées – sauf par Hafsia Herzi, toujours parfaite, et Biyouna qui sait limiter la casse. Pour se guérir de son manichéisme, le film se fait des piqûres d’antidote (quelques femmes conservatrices par-ci, quelques hommes féministes par-là), mais tous ces bricolages, évidemment, ne font qu’ajouter à la lourdeur générale de l’affaire.
Rien de plus convenu que La Source des femmes, dont on perçoit à chaque plan le labeur pour tenter de se rendre authentique, et de croire à son propre sujet. Sans une idée de mise en scène (toujours soumise à la quête du pathos à tout prix, de la touche pittoresque), le film donne le pitoyable sentiment de vouloir convaincre à tout prix, sans pour autant avoir la moindre chose à dire. C’est finalement lors des scènes de danse que le film de Mihaileanu parvient à trouver un semblant de justesse, alors qu’il se fait plus honnête avec lui-même et regagne les eaux, peu profondes mais moins dangereuses, du folklore exotique, de l’enluminure pour touriste. Dans ces moments plusieurs fois le fil du récit se dénoue, alors que s’ébauchent de simples mouvements de corps, inflexions de voix, agitations de couleurs. Pour le reste, triste Source. On lui aurait préféré, dans le genre guerre des sexes, un Calmos version femme.