Alors que le cinéma argentin n’en finit plus de nous surprendre par son dynamisme et son originalité (Tan de repente, La Ciénaga, Mundo Grùa et bientôt El Bonarense), L’Ours rouge vient à point nommé pour tempérer quelque peu notre enthousiasme. Plus convenu et moins formaliste que ses aînés, le film d’Adrian Caetano suit le retour d’un homme chez lui après des années passées en prison. Malgré le remariage de sa femme, il tente de reconquérir cette dernière et de gagner le coeur de sa petite fille qu’il n’a pas eu le temps de connaître. Conduit de manière assez linéaire, L’Ours rouge déploie un récit sans grande surprise multipliant les passages obligés (les confrontations d’abord houleuses puis plus calmes avec son ancienne épouse, le lent apprivoisement de sa gamine, le difficile retour à une vie honnête…). Adrian Caetano tente ici d’exporter dans un autre pays et à une autre époque les codes du western et du film de gangsters avec ses duels et le récit d’une reconversion évidemment ratée. Cela donne lieu à quelques réussites (notamment les scènes dans le bar, véritable « saloon » malfamé), hélas contrebalancées par une trop grande volonté de faire sens qui conduit parfois à la redondance. D’où une histoire que l’on peut prévoir de scène en scène et qui n’est même pas servie par une mise en scène brillante. N’est pas Wong Kar-waï qui veut…
Malgré tout, la performance de l’acteur principal interprété par un Julio Chavez alourdi de quinze kilos vaut quelque peu le détour. Cousin latin de Tony Soprano, il promène la même silhouette lourde et porte dans le regard ce même mélange de bonhomie (le côté gros nounours) et de terreur (les éclats cinglants du tueur). A lui seul, le comédien peut faire basculer une scène et apporte un peu de suspens dans cet ensemble trop routinier. Les amateurs de cinéma sud-américain connaissent déjà la talent de Julio Chavez, véritable star en Argentine, L’Ours rouge est une bonne occasion pour les autres de le découvrir.