Adepte des sujets « couillus » (l’enfer de la guerre dans Salvador, du Vietnam dans Platoon et Né un quatre juillet, la jungle yuppie dans Wall Street, les deux événements politiques les plus marquants de l’Amérique des années 60-70 dans JFK et Nixon…), Oliver Stone ne pouvait nous donner qu’une vision ultra-virile du football américain, milieu dans lequel « il en faut » selon L’Enfer du dimanche. Adepte d’un style direct qui ne s’embarrasse guère de suggestion, Oliver Stone dirige ses films comme on assène les coups de poing : franco.
Son nouvel opus ne nous démentira pas car qu’apprend-on en définitive sur le football américain après deux heures trente passées en sa compagnie ? Principalement que ce n’est pas un sport de mauviettes (voir le bruitage amplifié du son des placages, la carrure « armoire à glace » des athlètes, les rapports humains entièrement fondés sur la tension et l’intimidation…). Parsemée à chaque moment clé, la sentence, dont est tiré le titre américain -qui n’a rien à voir, soit dit en passant, avec son homologue falsificateur français-, « quel que soit le dimanche, que tu perdes ou que tu gagnes, l’important c’est de gagner en homme », résume la philosophie de comptoir du film. Celle-ci est complétée par un deuxième précepte que tente ardemment d’inculquer l’entraîneur vedette des Miami Sharks, le légendaire Tony D’Amato (Al Pacino, bien sûr) à ses joueurs : l’esprit d’équipe. C’est pourquoi, quand le nouveau joueur vedette de l’équipe commence à se la jouer perso, il y a du grabuge dans l’air. D’autant plus que Tony n’a plus la confiance de la présidente du club (Cameron Diaz à l’aise dans cet univers macho) qui le considère comme un has been. Avec L’Enfer du dimanche, Oliver Stone tente de construire un film bilan sur le football américain dans lequel s’opposent l’héritage idéologique issu d’un passé amateur et l’extrême professionnalisation actuelle qui place le fric et l’exposition médiatique au-dessus des bonnes vieilles valeurs d’honneur et d’honnêteté. On découvrira sans grande surprise que l’avenir du sport doit passer par la conciliation des deux époques.
Plus que son discours des plus convenus, c’est alors la forme du film qui nous impressionne le plus et notamment l’aisance avec laquelle Oliver Stone construit la toile narrative de son film. Hormis certaines scènes didactiques, le cinéaste multiplie les situations et les personnages et passe de l’un à l’autre tel Robert Altman ou plus récemment Paul Thomas Anderson dans Magnolia. Film choral à sa manière, L’Enfer du dimanche brosse un portrait dynamique du milieu footballistique qui permet la découverte de personnalités parfois attachantes (Ann-Margret en veuve alcoolo du big boss), souvent impressionnantes (les performances des rappeurs LL Cool J et Jamie Foxx, l’impeccable James Woods en soigneur véreux…). Grâce à son savoir-faire d’entertainer, Oliver Stone parvient à galvaniser son récit par un montage très rapide, toujours à l’affût d’un plan, et par une musique qui réunit les titres les plus hype du moment, de la techno au rap en passant par les tubes de Moby. L’Enfer du dimanche nous ressert ainsi le cocktail préféré du cinéaste fait de naïveté, d’esbroufe et d’efficacité…