Aller voir L’Attrape-rêves à l’heure de la bronzette relève a priori du militantisme. Ce film français, joué par des amateurs, réalisé sans moyens et dont l’histoire est fondée sur la quête d’identité d’une adolescente, n’a pas grand-chose d’accrocheur, et se trouve, en plus, en concurrence directe avec les dizaines d’autres films français à l’affiche en ce moment. Ce long métrage part alors à la bataille, armé de sa sincérité et avec un petit argument supplémentaire, les paysages du Tarn l’été.
Pour certains, seule suffirait la grâce de l’actrice principale, Laetitia Velay, une possible sœur jumelle de Marina Golovine, l’héroïne des Marchands de sable de Pierre Salvadori. Son rôle d’adolescente butée vaguement nymphomane est un grand classique qu’elle campe sans fioritures. Aucun des autres acteurs n’est marquant, mais les trois jeunes qui tournent autour d’elle sont suffisamment crédibles. Sa mère, attentive et pas dupe, est assez complexe pour ne pas faire « méchante maman qui étouffe sa fille », et même le beau-père, forcément haï par Juliette, s’en tire par l’humour en composant un baba new age faussement cool mais vraiment intégriste, resté dans les années 70 ou sur une autre planète, en tout cas incapable de comprendre le comportement basique de Juliette. Toujours décalé, trop lent ou trop mou, Grégoire Vigneron rappelle Jean-Pierre Daroussin dans Mes meilleurs copains, et ça suffit à nous faire éclater de rire à chacune de ses apparitions. Quant à la mise en scène d’Alain Ross, elle est à l’image de ces personnages : en demi-teinte, ne manquant ni d’élégance, ni de retenue dans le traitement des scènes de sexe avec Juliette.
Ce qui fait en somme beaucoup de petites qualités mais pas de vraies idées… Même le coma de Juliette, dans la deuxième moitié du film, passe sans heurter, sans faire basculer le film dans une autre dimension. Le drame de l’héroïne pousse tous ceux qui l’entourent à se découvrir. Là encore, tout reste dans une sympathique modestie, rien ne sera envoyé à la gueule, rien ne sera résolu. Dans son Tarn natal, Alain Ross préfère les prairies vallonnées aux gorges vertigineuses. Alors comme « film d’été », L’Attrape-rêves fait plus l’effet d’un martini un peu dilué que d’un pastis sec.