De Cannes (2008), l’annuelle livraison Dreamworks se voit (se boit) comme un soda qu’on siffle sur une aire d’autoroute un après midi de canicule. Sur le moment, ça rafraîchit, puis ça cale. Pas de maux de ventre, rien qu’un arrière goût chimique au fond de la gorge, au plus deux-trois gargouillis. Le Dreamworks nécessite une initiation. Il faut apprendre à évaluer sa tolérance, tenir le métrage à distance : tu me donnes peu, j’investis pareil. Kung fu panda est donc l’histoire d’un panda qui fait du kung fu. Il va se vautrer, suer, puis jouer les Jet Li obèses en sauveur du monde, rêve de geek. Ça tombe bien, ce panda en est un, de geek. Il collectionne les goodies, tète de l’anachronisme (rire éraillé du jeune public), écoute de la pop, reluque les gonzesses qui ont la voix d’Angelina Jolie. Son organe à lui, c’est Jack Black, roi des grassouillets revanchards.
Du Dreamworks pur beurre donc, mais qui file droit. Au moins le pastiche rigolard des classiques asiates en épouse les contours initiatiques, de quoi faire défiler les images de gauche à droite quand Shrek et tant d’autres louvoient et décrochent par principe (le fameux humour décalé). Là, le Panda s’initie, déçoit, se relève, trouve une technique, l’exploite, secondé par un maître Jedi qui suit le chemin parallèle. La mise en scène zappe de l’un à l’autre. Bêbête, mais d’une indiscutable stabilité. En sus du kung fu, le panda surfe sur des images qui s’autodétruisent dans son sillage. Tout le monde s’y accorde puisque le scénario désamorce lui-même ses Macguffin (la relique suprême promise au meilleur dragon, du toc) sans pour autant passer à autre chose. Il y a chez Dreamworks cette dimension persistante à être là sans y être (la pléiade de stars au doublage, dont la moitié en surcharge pondérale), de ventiler de l’air pour rien, par subversion automatique. C’est un parent pauvre profondément inutile (à moins qu’il ne fasse les poubelles, remember Nos voisins les hommes), dont on ne peut malheureusement pas dire qu’il n’existe pas.