Si Claude Lelouch et Ken Loach causaient amour, deuil et ONG, il en résulterait probablement ce puant amas de pellicule. Ignoblement complaisant, désespéramment démago, s’enfonçant avec fierté dans la pire nullité cinématographique, Kiss of life narre la destinée pleurnicharde d’une famille éclatée. Papa (Peter Mullan) est envoyé dans un ersatz de Tchéchénie pendant que Maman se fait télescoper par une rutilante berline dans une rue grisâtre de Grande Bretagne. Laborieuse équation qui trouve plusieurs réponses sociologico-sentimentales. Soient : les réactions à chaud de Papy gâteux, les deux mômes, papa en galère, fou d’amour pour une femme qu’il a trop longtemps délaissée. En prime, un fantôme de femme-mère qui borde ses enfants l’œil mouillé.
Incapable de tenir le rythme du film de deuil, Emily Young morcèle tout et n’importe quoi. A commencer par la structure, divisée en deux. D’un côté la grisaille britannique, où la surenchère des pantomimes dignes domine l’ensemble. De l’autre, une odyssée à la Indiana Jones en plus réaliste, avec caméra embarquée qui insiste sur chaque détail pathos. Sans aucun autre enjeu dramatique que de gagner du temps et faire choc, ces scènes témoignent du vide intersidéral de Kiss of Life, ou du moins, de son imperméabilité à tout raisonnement et émotion. Un patchwork de tentatives si vain qu’il laisse voir très distinctement le fil blanc reliant chaque grand écart de mise en scène. Unis par la culpabilité, incapables d’aider leur entourage, tous les personnages se perdent dans la subjectivité et la passion du sensoriel. Le père croit reconnaître son enfant dans un immeuble en ruines, le grand-père plonge dans le mutisme, et la mère esseulée et hystérique trouve plénitude et bienveillance dans la mort. Postulat intéressant, mais qui restera en l’état. Young a beau empiler différences de points de vue et morceaux de bravoure, elle ne trouve rien qui puisse étayer son sujet. Tout reste vaguement illustré, perdu dans un déluge de complaisance inutile et de gravité de supermarché. Ce qui rend la vision de cette agitation de cinéma strictement inutile. Au pire tout bonnement insupportable, au mieux platement pathétique, Kiss of life a tout de la fumisterie de festival.