Depuis qu’on ne lui fait plus jouer que des mamies perverses (La Pianiste) ou gagas (ici), depuis que Lelouch lui préfère Robert Namias ou Michel Leeb, Annie Girardot a perdu de sa superbe, c’est certain. Enfin voilà elle ne joue plus chez Visconti ou Ferreri ni même dans La Zizanie mais dans Je préfère qu’on reste amis, premier film d’un duo d’illustres inconnus. Ce n’est pas grave, d’ailleurs Gérard Depardieu y joue aussi. Leur lien : un informaticien (Jean-Paul Rouve) coincé dans son mini bureau de La Défense, dans son 2 pièces au quinzième étage, dans sa solitude et une vie qu’il n’aime pas plus que ça. En fait c’est lui-même qu’il n’aime pas plus que ça. Sa mère : Annie Girardot. Alzheimer, grave. Depardieu : son compère de lose. Il le rencontre lors d’un mariage où celui-ci fait profession de pique-assiette, d’intrus qui n’a rien à faire là sinon tenter de vérifier empiriquement une statistique (job : statisticien) : il paraît qu’un bon paquet de couples se forment lors des banquets de noces. Il est question aussi d’une autre statistique : à Paris deux couples sur trois divorcent.
Je préfère qu’on reste amis traite, sur le mode de la comédie, du désert affectif que traversent certains quadras, des mirages des agences de rencontre, etc. Sur le mode de la comédie, le film convainc peu. Archi répétitif (les interminables séances de speed-dating, mauvais sketch télé asséné à n’en plus finir), il avance benoîtement et met trois plombes à résoudre les petits problèmes de narration qu’il se pose. Et fait sentir aussi qu’il se préoccupe sérieusement de son sujet, volontarisme toujours déplaisant en pareil environnement. Plat sur la longueur, mollement rythmé et assez ingrat à l’image, il trouve quand même, in fine, son vrai sujet, le touche du doigt seulement. Avec les filles ça ne marche guère, mais les deux solitaires sont devenus amis. Parti sur la lose amoureuse, le film est arrivé sur le terrain, plus sec et plus inattendu, de l’amitié.