Pourquoi un film danois doit-il forcément être estampillé Dogme par Lars Von Trier et sa société de production Zentropa ? Italian for beginners est le cinquième long métrage à s’être plié aux lois du genre et ici, les principes dogmatiques se réduiraient plutôt à un pourquoi faire cher quand on peut faire Dogme, souvent seule et courte justification pour un tel parti pris. Mise à part une liberté de ton qui n’est heureusement pas propre au Dogme, la question reste donc posée et c’est dommage. Car ce troisième film écrit et réalisé par Lone Scherfig (après The Birthday trip en 1990 et On our own en 1998, récompensé dans plusieurs festivals), particulièrement enthousiasmant, étonne par sa fraîcheur et sa drôlerie.
Comédie douce-amère, un brin nostalgique, Italian for beginners met en scène les destins croisés de six trentenaires célibataires. Quel rapport y a-t-il entre une serveuse italienne qui prie Dieu dans les cuisines de son restaurant, un réceptionniste d’hôtel impuissant, un pasteur endeuillé, une coiffeuse touchée par un prince charmant mais macho, une pâtissière maladroite et un restaurateur fan de la Juventus ? Réponse : un cours d’italien, prétexte à les réunir et à nouer autour d’eux des amitiés, des amours et même des histoires de famille. Lone Scherfig s’attache à faire glisser imperceptiblement ces petites histoires éclatées vers celle, plus grande, d’un portrait de groupe, en mêlant habilement un humour décapant et une émotion sous-jacente, toujours prête à affleurer. Car au fond, ce qui anime ces personnages, c’est uniquement la quête de l’amour. Chacun, confronté à sa propre solitude, va devoir, pour aller vers les autres (avec la promesse d’une rencontre), se battre d’abord contre lui-même. Le sujet n’est pas nouveau mais son traitement, si. Italian for beginners distille un ton et un humour réjouissants, entre une vague mélancolie et quelques blagues teintées de désespoir sans jamais perdre la justesse et l’humanité qui caractérisent ses personnages. D’où peut-être cette sensation de liberté qui donne vie à la peinture acerbe et tendre d’une génération un peu paumée mais qui préfère en rire.