Spider-man 3, Pirates des Caraïbes 3, les sagas au long cours traînent un peu des pieds cette année. Harry Potter s’essouffle comme les autres, impression renforcée qu’en cinq épisodes et trois réalisateurs, cette franchise ne s’est jamais trouvée. A l’exception de l’opus 3 signé Alfonso Cuaron, tous restent soudés à la trame originelle de JK Rowling dans une fidélité synthétisante assez rasoir. Le dernier ne déroge pas à la règle : rasades de rebondissements, un nouveau personnage tous les quarts d’heure, une scène d’action succède à une illustration psychologisante postulant que oui, Harry évolue, qu’il vit sa crise d’ado comme toi jeune spectateur, d’où conte, allégorie, désir de profondeur, voire de métaphore politique derrière le carton-pâte hollywoodien, etc.
Secoué par la mort d’un camarade de chambrée au cours d’une agression de Voldemort, Harry a la rage. Poudlard le juge coupable, le ministère de la sorcellerie nie le retour du grand méchant loup, sauf une société secrète managée par Sirious Black qu’Harry intègre forcément. Mais voilà, une maîtresse revêche impose la loi du secret ainsi qu’un puritanisme à tout crin. Entre temps, Potter roule sa première pelle, comprend qu’ensemble c’est mieux (la vie), prend des nouvelles du barbu dans la cabane au fond du jardin, affronte son pire ennemi.
A s’empiler, les rebondissements inhibent la kyrielle d’idées de cinéma qu’Harry Potter est en droit de revendiquer. David Yates donne la sensation qu’il est en permanence à la bourre, qu’il bâcle faute de mieux, le film se résumant à un remplissage express, rapidement dépassé, comme une valise qu’on bourre de vêtements. N’émerge alors de tout ça que l’armature, la Potter’s touch, ses panoramiques gothiques, ses fresques animées qui confinent le ludique à un pur décorum, d’autant que le cinéaste, recruté pour sa britannitude loachienne, n’est pas très à l’aise avec les effets spéciaux.
Non que le film soit moche, mais il est noué, empesé, incapable d’étayer la moindre piste, pas même celle du malaise existentiel adolescent. Yates nourrit une contrariété permanente : académique lorsqu’il tâte du merveilleux ou de l’émotion, mal fagoté dans l’action pure (le finale tout pourri), très lourd quand il cherche la morale du conte ou le clin d’oeil à l’actualité : critique du puritanisme, mais surtout l’appel à la révolte – venant d’un film aussi verrouillé, aussi contrôlé qu’Harry Potter, c’est assez tordant. Forcément, le kitsch suinte par tous les bouts du cadre, à deux doigts de l’esthétique Prince de Lu, artificialité qui confine au film d’acteurs, tant ces derniers croquent le peu de biscuits dont ils disposent avec une vigueur inédite.