Pour avoir gardé en mémoire les stupides et hautaines critiques proférées à l’encontre de Richet pour son remake humble et carré de Assaut, on sait bien que s’attaquer à un des chef-d’oeuvres de Carpenter, c’est s’exposer à l’hallali. Rob Zombie risque à son tour d’essuyer quelques piques acerbes, ce qui serait tout aussi injuste vu les moments de furia très maîtrisés qui nous clouent parfois sur notre siège à la vue de ce remake de Halloween. Sans être complètement réussie, cet remix 2007 confirme le talent du réalisateur de The Devil’s rejects dont ici même on avait dit beaucoup de bien. La patte de Zombie s’affirme peu à peu en laissant de côté le carnavalesque qui était sa marque de fabrique, au profit d’une âpreté sèche et implacable. Dommage que le film souffre de la structure de son scénario qui, après une magnifique première partie, laisse place à un ventre mou au moment de reprendre le fil de l’original.
La première demi-heure se concentre sur l’enfance de Michael Myers dont Zombie se garde bien d’expliciter la monstruosité. Il y a quelque chose de curieux à voir ce pré-adolescent gus van santien parachuté dans un univers infiniment plus trash et bourrin que celui du maître américain. Le fracas de cette gueule d’angelot mal dégrossie avec les scènes de meurtres filmés dans leur plus triviale réalité a quelque chose de profondément dérangeant, et donne une beauté macabre qui laisse espérer un grand film (perdu quelque part entre Elephant et Henry, portrait of a serial killer). Ce qui frappe surtout, c’est la puissance brutale mise en scène par Zombie avec un sens inouï de la sauvagerie et de l’effroi physique. Carpenter mettait en scène les vides spatio-temporels entre les accès de violences, dans une manière presque japonaise de considérer le cinéma comme ce qui existe non pas dans les choses, mais entre les choses. Une façon de travailler le genre au moyens de purs enjeux formels en étirant le temps et l’espace (au delà des corps, c’est cela au fond que filmait Carpenter : le temps et l’espace).
Le film de Rob Zombie, au contraire, accélère tous ces passages, ne retrouvant de l’original que la mécanique, le programme, sans y ajouter d’élément nouveau (si bien qu’on s’ennuie même un peu en milieu de film). Pourtant, le film emporte le morceau à la faveur de son dernier quart d’heure, éblouissant. La force de Rob Zombie tient à cette manière granuleuse et sonore de filmer le chaos, qui doit sans doute beaucoup à son expérience de musicien. Comme si Zombie filmait le bruit, dans toute sa violence, sa matérialité, en se souciant moins de mélodie que de l’impact de chaque note. Dans les moments où le chant devient un hurlement, une éructation, le film devient alors vraiment impressionnant.