La gigantesque reproduction de la porte de Meknes trônant face à l’arc de triomphe en est le signe le plus visible, 1999 est « Le temps du Maroc ». Toute l’année, à Paris et en Province, art contemporain, patrimoine historique ou photographie se mettent à l’heure marocaine. Le cinéma n’est pas en reste, après Adieu Forain, sorti le 21 avril, un nouveau film nous est présenté, Femmes… et Femmes, avant d’autres sorties en juin et septembre.
Sorti il y a un an au Maroc, ce film, réalisé par Saâd Chraibi, a obtenu un succès tant public que critique : c’est un événement important pour l’histoire du cinéma marocain. Il a en effet raflé tous les prix principaux (réalisation, image, scénario) au festival International de Casablanca en 1998, puis obtenu le Prix du meilleur film africain arabophone au festival de Johannesburg et le prix Unicef de promotion de la femme en mars 99. Mais c’est surtout le nombre de spectateurs marocains qui réjouit son réalisateur : ils seraient aujourd’hui plus de 420 000, chiffre énorme pour le pays, d’autant que le sujet du film est loin d’être anodin…
En effet, Femmes… et Femmes retrace les retrouvailles de quatre amies, Zakia, Laila, Keltoum et Ghita, après des années de séparation. Elles ont chacune suivi leur chemin, ont connu plus ou moins la réussite sociale, mais gardent, comme au temps de leur toute première jeunesse, une amitié intacte les unes pour les autres. Citadines et émancipées, elles se trouvent pourtant confrontées à la violence conjugale et au machisme des relations professionnelles contre lesquels elles luttent âprement. Le film est donc très fortement teinté d’une vision de la femme libérée qui se veut maîtresse de son destin. On aurait pu le croire interdit par la censure ou tabou pour le peuple. Toute la richesse de Femmes… et Femmes se trouve donc ici, au-delà de quelques imperfections formelles pouvant accrocher le regard d’un spectateur français, dans ce partage avec les spectateurs marocains qui ont plébiscité le film.