Entre-aperçue dans Daredevil, gros loukoum super-héros à la gloriette de l’endive Ben Affleck, Elektra poursuit désormais ses aventures en solo. Déjà pourvue du rôle à l’époque, Jennifer Garner reproduisait timidement les pirouettes sexy d’Alias pour son premier quart d’heure de cinéma. Consacrée définitivement par la télé, la Fox la monte en grade. Pas d’affolement cependant : Elektra reste ultra-modeste. Script archi-débile, mise en scène robotique, budget minimum (effets numériques survolés et tournage à Vancouver, ça veut tout dire), la conformité aux exigences du petit écran trahit bien la précarité de l’actrice dans les hautes sphères d’Hollywood. Mais en lieu de spectacle fièrement rodé, Elektra paupérise le potentiel naissant de l’actrice, reléguée avant l’heure dans les poubelles du cinéma.
Modèle d’érotisme tonique, l’héroïne d’Alias se change en Britney Spears qui aurait dépassé la date limite de fraîcheur. Pour Rob Bowman, yesman bien rodé aux plateaux télés (21 jump street, MacGyver et surtout X-files, dont il a signé l’adaptation ciné), c’est le costume qui fait la star et non le contraire. Emprisonnée dans son pantalon taille basse, glaives rutilants et verroteries pré-adolescentes aux poignés, Garner doit retrouver son adolescence perdue et dans le même temps dilater une volupté de femme fatale de comics qu’elle n’aura jamais. Grand écart que réussit Alias finger in the nose, mais que loupe complètement le film, courbaturé par le kitch Marvel et sa lutte vaseuse entre le bien et le mal. Sa médiocrité passe alors au premier plan, sans filtre ni distanciation. Bowman filme la BD au raz des pâquerettes, ici effets spéciaux expédiés au numérique, là pauses d’initiations bidons, déblatérées par un Terrence Stamp en grand maître zen aveugle.
La présence de l’acteur le plus ouvertement cachetonneur du moment inscrit cependant le film dans une tradition plutôt sympathique des nanars des bas-fonds. On retrouve ici intact l’esprit d’un Russel Mulcahy (Highlander, Resurection) ou plus près de nous d’un Paul Anderson (Alien vs Predator), ces balayeurs joyeux des fins de séries d’Hollywood, certes filmeurs de l’immontrable mais sporadiquement touchés par la grâce : ici quand le scénario s’immerge sans complexe dans une innocence pré-adolescente. On pense aux méchants et leur super pouvoir de vignettes Panini (le colosse à la peau de pierre, le tatoué qui donne vie aux animaux sauvages dessinés sur sa peau), à l’irréalité naïve des décors, la Palme revenant au repère du mal, un temple bouddhiste en tôle ondulée juché sur un gratte-ciel du centre ville. Dommage que le film n’y aille pas plus fort encore, retenue par la star Garner, toujours déréglée par rapport aux intentions du film. Ce serait à refaire, on rêverait de Brigitt Nielsen.