Dante, planète infernale aux confins de l’univers. En orbite, un hôpital psychiatrique où un groupe de médecins se livre à quantité d’expériences sur leurs patients. Le dernier entré pose problème : vénéré par les uns (un dénommé Bouddha l’appelle « Saint-Georges tueur de dragon »), rejeté par les autres (un certain César, petit tyran de la bande, sic), le bonhomme est imperméable aux coups de couteau, ressuscite les morts en bouffant des pieuvres multicolores que lui seul peut voir. Pourtant, l’enfer se rapproche (la planète Dante, tu as pigé spectateur ?), les savants perdent le contrôle, l’homme est un loup pour l’homme, etc.
Maintes fois reporté, ce retour aux affaires de Marc Caro sonne le glas de l’avènement d’une science-fiction french touch qui en appelle autant à Tarkovski qu’à Jerry Bruckheimer. L’ex binôme de Jean Pierre Jeunet avait prévenu dans le dossier de presse : Dante 01 est censé creuser le sillon de Delicatessen et La Cité des enfants perdus, soit dessiner un univers poétique, soigner ses personnages (même les secondaires) et articuler le tout via une intrigue pleine de suspens et de rebondissements. Autant dire viser le chef-d’œuvre, ce que l’interminable accouchement du film confirme. Force est de constater qu’on est au final très loin du compte. Enlaidi par un déluge d’effets toc, perdu dans une galaxie de symbolique foireuse, en appelant à la pose et l’expérimentation de jeune débutant, le film plonge dans un ressassement autiste parfaitement stérile.
Récapitulons : l’univers pourrait envier celui d’une banal série B, hésitant entre kitch et académisme spatial (crânes rasés, uniformes cols Mao à la Star Trek), les personnages se trouvent réduits à l’état de vignettes jaunies (toutes les tronches de La Cité à l’exception de Jean Claude Dreyfus) ou d’automates dévitalisés (Lambert Wilson, épileptique tout du long). La mise en scène entend se libérer au cours de séquences anthologiques que le film empile comme des perles dans le derniers tiers. Pas gagné. Le brio n’apparaît que par petits éclats (un cadrage, une belle lumière), le tout lesté par un mouvement général atone. Le finale, feux d’artifice de frime et de grand n’importe quoi, en dit long sur la sérénité défaillante du cinéaste : le délire artistique est confiné à l’impuissance absolue, cabotinage sensoriel éprouvant par son entêtement, déprimant par son immaturité grasse. Delicatessen et La Cité avaient pour eux un point de vue de conteur, ce qui disparaît ici. Dante 01 reste un nanar intergalactique en forme de trou noir dont Caro aura bien du mal à se sortir.