On aurait aimé écrire du bien sur Central do Brasil parce qu’un film brésilien est un événement, compte tenu de la maigre production en provenance de ce pays (aucun film n’est sorti en 1991 et 1992 !), mais force est de constater notre impuissance à nous y appliquer. Walter Salles est pour la presse une figure assez commode. Parce que son premier film Terre lointaine a remporté un joli succès, notamment aux États-Unis, on s’empresse de l’établir en représentant mondial du cinéma brésilien, et en témoin d’une renaissance de cette cinématographie. La facilité avec laquelle ce statut s’est créé provoque une quasi absence de jugement. Sous prétexte d’aider une cinématographie en crise, on s’interdit la critique. Alors voilà, cela fait mal au cœur de l’écrire, mais je n’aime pas le film de Walter Salles. Je n’aime pas son film parce qu’il est convenu et consensuel, à l’image du festival de Berlin dans lequel il a obtenu l’Ours d’or en 1998. Là où les palmarès frisent le ridicule, c’est en accordant au film le prix du scénario au festival de Sundance 1998 ! Quoi de plus déjà vu que cette histoire d’une rencontre entre un petit garçon orphelin de mère qui recherche son père, et une femme d’âge mûr, aigrie par la vie ! Bien sûr, au début, ça capote entre les deux, et bien sûr à la fin ils vont s’aimer, et le petit garçon va rendre moins triste la dame. On a déjà vu cette histoire au moins dans Le Huitième jour de Jaco Van Dormael !
Cependant le film n’est pas entièrement raté, et ce, en particulier grâce à l’interprétation des deux protagonistes qui rendent leur duo émouvant, mais aussi assez pittoresque. De plus on remarque un attachement du réalisateur à son pays, le Brésil, qui ne laisse pas indifférent. Grâce à son passé de réalisateur de documentaire, Walter Salles filme avec intelligence et finesse ce pays et ses congénères. Lorsque Dora fait l’écrivain publique, il nous offre une galerie de portraits chamarrée et pleine de piquant, à l’image du cosmopolitisme brésilien. Si le film part de la gare de Rio de Janeiro bondée et stressante, il s’arrête finalement au cœur du Brésil, et nous permet de sentir les disparités d’un pays où modernité et industrialisation côtoient misère et archaïsme.
Central do Brasil vaut la peine d’être vu pour les à côtés de l’histoire. Pour le reste, ces qualités restent vaines par rapport à son manque d’originalité. Un peu d’imprévu aurait été le bienvenu dans cette aventure qui, pour couronner le tout, finit en mélodrame, histoire de nous arracher une petite larme. On aurait aimé pleurer, mais c’était tellement prévisible !