Un an après la sortie du déjà mythique Projet Blair witch, le recul nous permet de mieux discerner les éléments qui ont fait la force du film. Par divers procédés de mise en scène (caméra hasardeuse, séquences vidéo intimistes, montage sonore dépouillé), une direction d’acteurs dépassant les limites de l' »Actor studio », et surtout, un conditionnement du public amené par une habile campagne médiatique, les réalisateurs ont conféré à leur film une véritable impression de réalité. Même fabriquée de toutes pièces, celle-ci restait terriblement efficace pour le spectateur acceptant de se prendre au jeu… Au final, l’explosion inattendue du box office provoquée par le Projet Blair witch impliquait une suite. Mais comment succéder à un long métrage dont toute la force repose sur un unique concept sans tomber dans la répétition ?
La solution adoptée par Joe Berlinger reste très classique… Dès le panneau d’introduction, Le Livre des ombres est présenté comme une œuvre de fiction pure, s’inspirant de faits soit-disant réels mais romancés. On comprend progressivement l’ambition du film : une sorte d' »anti Blairwitch ». Le montage est travaillé, une bande son calibrée accompagne les images, la photo 35mm est soignée… Afin de ne pas rester dans l’ombre du premier volet, Berlinger a donc choisi de s’en éloigner un maximum en réalisant une série B d’horreur traditionnelle. Pourquoi pas, après tout ? Mais les principales failles du film apparaissent une fois le scénario installé. Une bande d’étudiants partent en expédition touristique dans la forêt de Blair. Après quelques mésaventures, ces derniers se retrouvent prisonniers dans une maison hantée par les démons du coin. Face à un scénario si conventionnel, on pense tout d’abord à un hommage cherchant à renouer avec les classiques du genre… Seulement, scène après scène, Le Livre des ombres finit par plagier quelques pièces d’anthologie du film d’horreur. A commencer par les mythiques Evil Dead (I et II) de Sam Raimi. Le cadre est strictement identique (une maison isolée au milieu de la forêt), de même que beaucoup d’éléments narratifs (une jeune fille possédée, des meurtres inexpliqués). Idem pour la construction du film : folie et paranoïa amènent crescendo l’évolution dramatique. Sans parler de la passerelle, unique moyen de quitter les lieux, qui s’écroule une fois les protagonistes entrés dans la maison (cf. Evil Dead, encore). De temps à autre, Le Livre des ombres va même jusqu’à voler quelques idées au Shining de Stanley Kubrick, lors de l’apparition du spectre d’une petite fille morte par exemple.
On pourrait aussi parler des effets visuels calqués sur L’Echelle de Jacob d’Adrian Lyne, des jeunes enfants au teint blafard que l’on croirait échappés du Village des Damnés de John Carpenter ou de la musique caricaturale, alliant métal gothique et effets audio pour couloirs de trains fantômes… Mais pas la peine de s’attarder. Le Livre des ombres est tout simplement un film d’horreur raté, bourré « d’effets surprises » remâchés et inefficaces. Un mauvais film de vidéoclub…