Bienvenue en Suisse, gros nanard comme on pensait ne plus jamais en voir, serait passé totalement et sanitairement inaperçu si il n’avait pas eu l’honneur de faire l’ouverture de la section Un Certain Regard lors du dernier Festival de Cannes. Pourtant, c’est un vilain film. Pourtant il a été sélectionné dans un assez gros festival. Donc il ne doit pas être si mauvais que cela, c’est peut-être même un film à fortes qualités esthétiques et / ou comiques. Quelques faits indéniables viennent à l’appui de cette thèse. D’abord, la photogénie bien connue des flancs majestueux des Alpes, qui autorise une série de plans très larges, presque des vues Lumière. Ensuite l’irréstible et confirmé talent d’imitateur de Vincent Perez capable, comme Michel Leeb ou Guy Montagné, de s’approprier mille et un accent régionaux, ce qui est très rigolo. Il faut le voir, le Vincent, traînant les voyelles, ricochant sur les consonnes : il est for-mi-dable. Enfin, le principal argument de la défense serait un plaidoyer pour le retour aux blagues de grand-papa. C’est vrai, il n’y a pas tant de films que ça qui, aujourd’hui, osent tripoter le ressort du comique national, l’art de rigoler en choeur des stéréotypes locaux : Belges, Ecossais, Suisses (donc), etc. Y a pas de mal à ça…
Bienvenue en Suisse est donc une comédie qui se déroule en partie dans les Alpages, où Vincent Perez se fond dans son personnage de Suisse, et où l’on sautille sur la caricature des Helvètes. Chouette. L’histoire ? Le prétexte plutôt : Denis Podalydès, Suisse auto-renié, revient au pays natal, apprend qu’il va hériter d’une grosse fortune, mais à condition de prouver qu’il a la Suisse dans la peau. D’où training (traire les vaches, faire une fondue, supporter les bermudas montagnards, etc.), avec Vincent Perez en prof, lequel se tape la femme de l’autre (ça c’est pour l’aspect pantalonnade à deux francs suisses du film). On sent combien le film se dresse sur ses papattes pour guetter toute attaque du style « pas touche à la caricature politiquement incorrecte », pour lui rétorquer de volée : « Oh hé hein, humouuur ». Ben justement, l’humour, c’est précisément le gros problème du film.